– D’accord c’était donc cela la parotidite, c’étaient les oreillons !
– Pourquoi ? demande Fred.
– Madame Secondat m’a envoyé un dossier sur Leyden. Il y avait un dossier médical concernant une parotidite. Je n’avais pas compris quand j’ai lu et je crois qu’elle non plus. C’est énorme ce que tu as trouvé là. Tu as le bras long !
– Non, de bonnes relations, pas forcément haut placées mais bien placées, au bon endroit…
– Et tu ne pourrais pas m’obtenir des infos sur un petit margoulin à qui j’ai eu affaire ?
– Doucement, ce n’est pas une agence de renseignements ici. De qui s’agit-il ?
– Un soi-disant Renato, de son vrai nom René Luruquin, je crois. Ou éventuellement Gian-Marco Cobrizzi. Ce gars c’est le copain de Sara, il a cherché à me truander. Il a été un peu déçu, je te raconterai. Mais j’aimerais en savoir un peu plus sur lui et aussi sur Sara.
– Oh oh, je pensais que vous filiez le parfait amour ?
– Moi aussi je le pensais, jusqu’à hier.
– Ce type, c’est celui avec lequel elle était à l’inauguration où on s’est connus ? Ce bellâtre qui faisait ami-ami avec les Le Blévec et Lepetiot ?
– C’est lui. Tu crois que tu peux faire quelque chose ?
– Je vais essayer mais je ne te promets pas une enquête en règle. Ou ce type est bien connu des services de police, comme on dit, et alors là no problème je te rappelle rapidement. Ou c’est un illustre inconnu et c’est tout. Tu as dit René Luruquin, dit Renato. Et Sara, rappelle-moi son nom ?
– Sara Weill-Lucet.
– Ok, je vois cela et je te rappelle en fin de matinée pour te dire s’il y a de la matière. à plus.
Il raccroche. Son café a refroidi. Il le jette et s’en sert une autre tasse.
Ce sacré Leyden ne me lâche pas, se dit-il. Avec lui, il se passe toujours quelque chose, comme s’il fallait absolument qu’il arrive jusqu’à la vérité dans cette affaire.
Il sirote une autre tasse de café et se met devant son ordinateur. Il ne cherche rien de particulier, il regarde un peu les infos, il fait des réussites et le temps passe. Le téléphone sonne, c’est Fred.
– Eh bien, tu vois, j’ai de quoi parler, dit-il. Ton René Luruquin n’est pas un inconnu. Il a même un casier. Oh, c’est pas la grande truanderie, c’est plutôt le petit escroc. Il a fait dans la fausse monnaie et les faux fafs.
– Je m’en doutais un peu, je te raconterai plus tard.
– Mais il est aussi tombé pour proxénétisme : pas le mac de grande envergure non plus, mais il a eu son heure de gloire. Il avait deux gagneuses, ça roulait pour lui et un jour, pour dieu sait quelle raison, elles l’ont chopé par le colback et rossé d’importance. L’histoire a fait le tour de la capitale. Il a laissé tomber le pain de fesses et s’est mis à vivre de petites escroqueries. Il a rencontré tu sais qui ?
– Sara ?
– Perdu, une certaine Antoinette Lucet, divorcée de Lucien Weill. Enfin, mariée à dix-huit ans et divorcée à vingt-huit. Elle tombe sur ce Luruquin qui monte aussitôt un négoce de ses charmes et de ses talents. C’est une vraie artiste, peintre de talent et copiste de qualité. Acoquinée avec Luruquin, elle devient une vraie faussaire et une authentique gourgandine. Vraie faussaire, mais sans génie : elle copie. Luruquin vend les copies à prix réduit à des bourgeois friqués à qui il laisse sous entendre que le tableau est un original probablement volé. Acheter ce tableau est un investissement à long terme, il faut attendre que les choses se tassent et le bourgeois pense qu’il laisse une fortune cachée à ses descendants. D’où, peu de plaintes de la part des acheteurs. Mais quand on ne vend pas cher… on vend beaucoup et quand on vend beaucoup il y a toujours un risque de tomber sur un os. Ils avaient même réussi à couillonner un avocat. Mais ils sont tombés sur un épicier en gros qui a porté le pet. Ils auraient été coincés s’ils n’avaient pas pris en vitesse un vol pour Buenos-Aires. Les flics ont enquêté, ils avaient plusieurs autres pistes mais aucune plainte. Les deux lascars sont revenus deux ou trois ans plus tard et auraient repris leurs activités. Il y a aussi eu des plaintes pour chantage et extorsion de fonds. Antoinette draguait des bourgeois, les ramenait chez elle et René débarquait et faisait un foin terrible, ne se calmant qu’à la vue d’espèces sonnantes et trébuchantes. Mais ils sont toujours passés entre les gouttes, les plaintes n’ont jamais abouti. Ensuite, pour la police, Antoinette a disparu. Renato a continué à bricoler ici ou là. Il a une activité officielle, il est le secrétaire d’un financier et il s’occupe de sa collection de voitures anciennes.
– De là la BM, dit Hervé in petto.
(à suivre...)