« Qu’est-ce que c’est trente Euros de nos jours ? Aujourd’hui,
pour trente Euros, t’as plus rien…» Ainsi parlait Sara Toussetra, buraliste et
marchande de journaux. Cette déclaration me surprenant, je me hasardai à intervenir
dans la conversation qu’elle tenait avec Madame Grelot.
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Pardon, dis-je, mais vous pensez qu’auparavant
on pouvait acheter rien avec trente Euros ?
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Mais, mon pauvre Monsieur, avant, avec trente
francs, on faisait un caddie plein plus un paquet de clopes. Alors que de nos
jours… mais vous vouliez le Canard ? Il n’est pas encore arrivé, Monsieur
Forelle !
Rien n’est jamais acquis, paraît-il. Et pourtant, la vie est bizarrement simple. En effet si je n’ai rien, je suis sûr que cela m’est acquis. Le rien est ce que tout le monde vous accordera non sans scrupule mais avec générosité. Nul ne vous disputera le rien. Toutefois, le moins que rien n’est pas à la portée de tous, c’est une affaire de riche. Si vous n’avez rien, il ne vous est pas possible d’en avoir moins. Mais si l’on en a suffisamment plus, il est possible d’envisager le moins que rien. Voyez Monsieur Tapie : on lui a en a pris tant et plus, tant et si bien qu’avec moins que rien il en a davantage que s’il n’avait absolument rien. C’est en outre là qu’intervient l’impôt négatif, épigone du généreux avoir fiscal. Le fisc vénère les riches, méprise les pauvres et choie ceux qui, ayant tout perdu et même plus, on tout à gagner et moins que rien à perdre. Voyez Monsieur Cahuzac : avec trois fois rien il faisait pousser des poils sur les œufs et ces trois poils se sont retrouvés sur un compte dans une banque alpestre. Rien à déclarer ? Non, moins que rien, trois fois rien, monsieur le gabelou…
On peut donc en conclure que ne rien avoir – strictement rien
et ni plus ni moins – est la seule situation stable de nos jours : le rien
ne craint ni inflation ni déflation, il n’est nullement partie prenante dans la
croissance, il n’est pas encore taxable même s’il ne rapporte guère.
On voit par là que le rien fait partie de ce je-ne-sais-quoi
que nul ne peut ignorer.
J'ai rien pigé... Mais j'adore ! Ces petits rien me font rire. Mais je ne ris pas pour rien ! Comme quoi...
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