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dimanche 26 avril 2020

Chronique de Serres et d’ailleurs V (33)

Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Il y aurait bien des choses à dire sur la situation actuelle mais, pour ne pas ajouter à la cacophonie ambiante, je vous parlerai une fois encore d’un livre, un beau livre intitulé « Pigeonniers de France », édité en 1991 chez Privat à Toulouse et dont l’auteur est Dominique Letellier qui fut architecte des bâtiments de France et notamment chef du service départemental de l’architecture en Haute-Garonne. Il peut paraître étrange que je mette en valeur ce que l’on appelle de façon simpliste un ABF mais le maçon que je fus se doit de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain même s’il a parfois eu maille à partir avec certains de ces ABF.

Ce livre est largement illustré de belles photographies et nombreux sont celles et ceux qui reconnaîtront des petits bâtiments qu’ils ont déjà vus et admirés dans notre région car il fait la part belle au bâti en Midi-Pyrénées, région riche en pigeonniers. Ceux-ci rivalisent d’originalité et sont pour beaucoup de vraies créations artistiques tout en respectant les nécessités fonctionnelles de l’élevage du pigeon. Pendant la révolution, beaucoup d’édifices de caractère ont été rasés, ou vandalisés. Toutefois les pigeonniers ont été respectés, même s’ils étaient quelquefois un attribut des seigneurs, et ce principalement pour épargner un instrument de travail.

La première partie du livre aborde l’histoire économique et sociale. D’une part, l’élevage des pigeons dans notre région était d’un rapport intéressant et, d’autre part, l’esthétique particulière montrait l’importance et le goût du propriétaire. En outre, chaque pigeonnier est le reflet du sol dont il est issu, que ce soit la pierre, la brique, le bois, le torchis…L’auteur évoque rapidement les pigeonniers mobiles, l’usage militaire du pigeon voyageur et la colombophilie.

La deuxième partie a pour sujet la typologie régionale et architecturale. On visite ainsi l’Artois, la Normandie, le Tarn, le sud-ouest de l’Aveyron et Midi-Pyrénées. Et il cite, en les expliquant, les différents styles de pigeonniers, la gariotte, la tourelle et le balet, le porche et le grenier, la tour, le pied-de-mulet et les pigeonniers sur pieds et arcades. Ensuite, il passe en revue les épis de faîtage dont le but n’était pas seulement de relever l’esthétique de l’ouvrage mais aussi de donner un point de repère aux pigeons.

Ensuite, il nous fait un éventail des lieux et œuvres les plus typiques du Quercy car c’est une région qui possède un grand nombre de pigeonniers qui, pour la plupart ont été conservés et restaurés. Ji dirai entre parenthèses que je si maintenant on n’a plus le droit, en théorie, de démolir un de ces bâtiments, il est encore au moins un paysan – pardon, un exploitant agricole, s’il vous plaît – qui, s’étant vu refuser sa demande de démolition au prétexte que son pigeonnier était dans son champ, s’est permis de l’arroser au canon d’irrigation pendant un nombre d’heures suffisant pour qu’il s’écroule. Il n’y a pas qu’en Béotie qu’il y a des béotiens…

En quatrième partie, l’architecte donne des conseils de restauration, tant pour la pierre, la terre crue, la brique, les joints, les charpentes et les divers types de couvertures. Puis, à la fin, il donne un glossaire et c’est un délice de retrouver ou d’apprendre tant de termes du jargon des artisans. J’en citerai un : la randière qui désigne cette rangée de tuiles vernissées en façade pour empêcher les rongeurs de monter dans le pigeonnier, ornementale autant qu’indispensable.

Ce livre m’a enchanté, je l’avais acheté sur les conseils d’un vrai libraire, celui que, sous les cornières d’Agen on appelait Quesseveur, un homme de goût, lui ! Une prochaine fois, je vous décrirai l’un ou l’autre de ces si gracieux pigeonniers.

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