Chronique du temps exigu (3)
Il y a beaucoup d’étrangers de par le monde. Il y en a aussi
chez nous. J’ai moi-même un peu voyagé et visité quelques pays peuplés
d’étrangers. Ceux qui ont beaucoup voyagé relatent cet état de fait,
quelquefois sans s’en douter.
Il y a des pays où l’on rencontre un grand nombre
d’étrangers. Sans compter les autochtones. Certains cumulent même les deux
qualités. Et il ne faut pas les confondre avec les indigènes, eux-mêmes
différents des allogènes.
Nombre de ces étrangers sont pourvus de langues dites, à
juste titre, étrangères. Mais il y a aussi des langues vernaculaires qui cessent
de l’être aussitôt qu’elles sont pratiquées par des étrangers, principalement à
l’étranger. Elles ne sont pas pour autant des langues mortes, ce privilège
étant généralement réservé à quelques langues embaumées par la science ou par la religion.
Les étrangers, de même que les autochtones et les indigènes,
sont, eux, bien vivants et c’est là le problème qui devrait nous préoccuper. En
effet, par ces temps où notre démographie court au galop, il serait judicieux
de réduire la place prise par les étrangers. Ce que suggère mon voisin taxidermiste,
c’est de les naturaliser.
En effet, naturalisé par des méthodes rigoureuses,
l’étranger peut être plus facilement empilé, classé et protégé contre les
mites. On verra plus tard s’il y a lieu de naturaliser les nationaux.
Il ne restera plus que la question des langues étrangères
qui n’auront pas eu la chance de mourir de mort naturelle. Elles deviendraient
des langues mortes, par faute de locuteurs. Car l’étranger, sauf cas de
mutisme, est généralement aussi un locuteur. Un locuteur de langue vernaculaire
quand il est chez lui à l’étranger et un locuteur de langue étrangère dans un
certain nombre d’autres cas. Mais l’étranger naturalisé est dans la majeure
partie des cas fort silencieux.
On voit par là qu’un étranger naturalisé peut devenir moins
encombrant.
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