Pendant que d’autres sont en vacances, il en est qui
travaillent et, parmi ceux-ci, notre premier ministre qui est allé visiter un chantier
afin de montrer qu’il se soucie de la pénibilité au travail, casque jaune sur
le chef et accompagné d’éminents spécialistes. Un peu paresseux en ce mois d’août,
je me permets de vous resservir ma 34ème chronique du 18 novembre
2012 qui reste d’une brûlante actualité :
« La pénibilité au travail, on en parle et on en
reparle mais qu’en sait-on réellement ?
Il y a quelques années de cela, l’expression est devenue à
la mode dans les milieux que j’appellerais compétents, à savoir les
représentants du patronat, les syndicats, les spécialistes du ministère du
travail et chez les politiciens. La liste n’en est pas exhaustive.
Donc, pendant que d’aucuns bossaient dur, d’autres parlaient
de pénibilité au travail sans toujours savoir de quoi ils parlaient. Je n’ai
pas dit qu’ils ne savaient pas ce qu’ils disaient car les gens compétents
savent toujours ce qu’ils disent. Cela n’est pas pour autant qu’ils savent de
quoi ils parlent. Mais ils sont dans les milieux autorisés et généralement bien
informés, ainsi que le dirait un journaliste moyen.
Or, une personne compétente et qui sait ce qu’elle dit a
parfois une étincelle de lucidité qui lui fait comprendre qu’elle ignore un peu
de quoi elle parle. Donc, dans les milieux compétents, on a jugé nécessaire
d’aller sur le terrain pour recueillir des informations sur la pénibilité au
travail. Un corps d’inspecteurs de la pénibilité au travail a donc été créé
dans ce but. Hélas, ces personnels étaient formés au travail de la fonction
publique et n’étaient nullement préparés à affronter la pénibilité réelle
au travail. Ce fut une hécatombe, à juste titre, car la centaine de ces
inspecteurs envoyée sur le terrain a disparu corps et biens, les uns purement
et simplement détruits par le travail, Moloch insatiable, les autres brutalement
happés par la retraite anticipée, hydre aux mille têtes.
Il fallut bien se rendre à l’évidence, on n'y arriverait pas
ainsi. On choisit alors un certain nombre d’ouvriers et d’ouvrières travaillant
dans des conditions sordides, bruyantes et dures. On leur proposa la
possibilité de partir plus tôt à la retraite mais, fort avisés, celles-ci et
ceux-ci refusèrent cette proposition. Non qu’ils fussent désireux de continuer
à travailler dans des conditions pénibles mais parce qu’ils et elles
préféraient encore leur maigre salaire, même pour un labeur pénible, à leur
encore plus mince retraite.
Cela ne perturba pas l’aréopage de têtes pensantes des
milieux compétents. De l’argent avait été alloué pour compenser la pénibilité
au travail et il fut unanimement attribué aux membres de cette commission
qui purent prendre une retraite bien méritée après s’être si durement penchés
sur une telle question. Qui acheta une villa sur la côte, qui se fit construire
une piscine et qui fit l’acquisition d’un camping-car.
On voit par là qu’il n’est pas simple de faire le bonheur
des autres et que gratitude bien ordonnée commence par soi-même. »
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