Là, j’éclatai de rire :
— C’est pas pour rien que
je t’appelle René-la-science. Bon, je vais te raconter, mais je te recommande
la discrétion absolue. L’honneur d’une dame est en jeu !
— Tu sais bien que je ne
badine pas avec l’honneur des dames. Accouche…
— Bien, bien, on ne peut
plus plaisanter ici. Alors voilà l’histoire, c’est très simple…
— Accouche, insiste René.
— Hier soir, nous sommes
allés ensemble jusqu’à la ferme de ce monsieur Valin. Tu m’as montré les lieux,
tu es reparti et je me suis couché presqu’aussitôt. J’étais bien endormi quand
j’ai entendu soupirer les anges au rez-de-chaussée.
— Qu’entends-tu par « les
anges » ? me demanda René avec un faux air ingénu.
— Ce que tu as entendu
toi-même. Il y avait des locataires à l’étage du dessous et ils étaient en
train de se reproduire.
— Et… tu as fait quoi ?
— J’ai écouté, puis je me
suis recouché. Soit mes colocataires allaient se fatiguer tout seuls, soit, et
là c’est plus pervers, tu m’avais monté un coup fumant, une mystification…
— Ah, non, je te jure que
non. Je suis capable de bien des blagues, mais pour une fois, je n’y suis pour
rien. Bon, la suite Fortunio, parce que je suppose qu’il y a une suite. La
voiture c’était donc eux ?
— Ils avaient bien une
voiture, mais ils sont certainement arrivés discrètement. Je me suis donc remis
au lit, mais là, difficile de se rendormir…
— Tu avais une paluche
qui te démangeait ? insinua René.
— S’il te plaît, s’il te
plaît, tu deviendrais presque trivial, mon cher René.
— La suite, Fortunio…
— J’y arrive, c’est toi
qui m’interromps avec tes grossières insinuations…
— LA suite, accouche…
— J’aime quand tu
t’énerves, tu montre tes belles dents, lancé-je.
René prit un air excédé
et je repris mon histoire :
— Donc, j’essayais de
dormir et voilà t’y pas que j’entends arriver un véhicule, mais pas dans le
genre discret. Je me mets furtivement à la fenêtre. Je vois un gros 4 x 4, un
type qui en sort comme une fusée et qui entre dans la maison. Je n’ai pas le
temps d’aller voir sur le palier qu’il repart en trainant par le bras une
gonzesse à poil. Il la pousse sur le siège passager et revient dans la maison. J’écoute
et j’entends deux claquements secs : deux bourre-pif. Le mec ressort de la
maison et je reviens à la fenêtre. Il balance un paquet de vêtements à la nana,
se met au volant et part aussi sec. Je ne pouvais que supposer qu’il y avait
encore quelqu’un au rez-de-chaussée et je suis allé voir. Il y avait une
chambre dont la porte était ouverte, par terre un mec à poil avec la gueule en
sang.
— Ça t’a pas fait bander
quand même, ricane René.
(à suivre...)
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