Appelez-moi Fortunio (65)

Ils préparent le thé et vont s’installer dans le salon.

-          L’endroit serait agréable mais manque un peu de lumière malgré les volets ajourés, décrète René. Ne pourrions-nous ouvrir l’un ou l’autre volet, ne fut ce que les entrebâiller ?

-          Pas question, il faut éviter à tout prix d’être vus. Par contre, on peut allumer la lumière car Daniel est censé être dans la maison. Tiens, regarde, l’interrupteur est là, allume donc ce magnifique lustre !

René allume et l’éclairage révèle maintenant bien mieux les objets étranges et variés de la collection. Il s’étonne de voir un ensemble de quatre fers à cheval en métal doré.

-          Dis donc, mon pote ! dit-il en en soupesant un. Je ne sais pas si cela était destiné à être posé sur des sabots de canasson mais je te parie tout ce que tu veux que c’est de l’or massif.

-          Tu sais, le cuivre ou le laiton sont parfois trompeurs…

-          Pas dur, il suffit de le tremper dans une mesure graduée, tu auras le volume et comme l’or a une densité approximative qui est le double du cuivre ou du laiton, c’est vite vu. Mais en tout cas, avec ces quatre fers il y en a pour une poignée de fèves, je te le dis !

-          C’est vrai et pourtant, on dirait que cela ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval…Merci pour le cours de physique et chimie, mon cher La-Science !

-          Si tu veux ! dit René en poursuivant son inspection. Et c’est quoi ce petit placard ? Evidemment, il est fermé à clé ! Ops, pas de problème, elle est au-dessus du montant. J’ouvre ou je n’ouvre pas, à ton avis ?

-          Ecoute, tu es un grand gaillard, tu es ici en mission, donc si tu as envie d’ouvrir, tu ouvres !

Il met la clé dans la serrure et ouvre.

-          Aaaaah ! rugit-il en blêmissant.

Albert se lève rapidement, pensant que René va se trouver mal. C’est à son tour de pousser un cri en voyant ce qui est accroché au fond du petit placard mural. C’est un masque, probablement africain, fabriqué sur la base d’un crâne humain. Deux yeux rouges scintillent dans les orbites. Le tour du masque est décoré de cheveux noirs hérissés, la bouche semble prête à proférer, entre ses dents jaunes, une malédiction terrible. L’ensemble est impressionnant.

-          La-Science, tu me refermes ça vite fait et tu remets la clé en place, je ne veux plus voir ce truc.

-          Attends, en dessous il y a une plaque, qu’on sache au moins ce que c’est, répond René. Il est marqué : Masque Okwoto, Afrique centrale. Bon, on n’est pas bien avancé en sachant cela.

René referme le placard et remet la clé en place.

-          Bien, dit-il, je vais m’asseoir, ce truc m’a foutu une sacrée frousse. Tiens, je vais aller pisser d’abord, il paraît que c’est souverain pour ne pas choper la jaunisse en cas de grande frayeur.

-          Eh bien, va cours, pisse et nous venge ! Puis reviens boire ton thé qui est en train de refroidir.

(à suivre...)