Mais avec le jour émergeait la dure réalité des choses
et des hommes, le soleil montrait que la sottise humaine emplit le monde de son
odeur triste et fade, de sa brume opaque et disgracieuse ainsi que de sa clameur sourde
et rauque. La sottise, oui, non point la bêtise ou la connerie.
La connerie, en effet, est le fait de tous et nul ne
sait s’il n’est point le con d’un autre. De plus, respectons l’origine du mot
qui lui-même désigne l’origine du monde et Dieu sait pourquoi ce mot si doux a
si mal tourné.
La bêtise est accessible au moindres comme aux
meilleurs d’entre nous ; il n’est pas rare que l’on puisse se dire :
« Mince alors, suis-je bête ! ». Erreur excusable et souvent vénielle,
la bêtise semble sortir de nous comme si nous n’y avions pas fait attention,
comme survenue d’un fonctionnement reptilien et donc en quelque sorte animal.
Et c’est bien le genre d’erreur que l’on ne refera plus la prochaine fois car
on y sera attentif. L’erreur est humaine, dit-on. Mais y persévérer est
diabolique, ajoutent certains : c’est
pas parce qu’on a mis le pied dedans qu’il faut y mettre les mains.
Et c’est là
qu’arrive pompeusement la sottise, apanage de ceux qui se parant des plumes
ocellées d’une raison falsifiée montrent à qui sait voir un orifice postérieur
souillé de leur arrogance et de leur stupidité, de ceux qui, persévérant dans
la bêtise s’en flattent et font l’admiration d’autres sots, les crétins se
reconnaissant entre eux, les demeurés s’acoquinant et les débiles se
congratulant mutuellement. L’impuissance de leur pensée n’a d’égale que leur
cécité mentale, leur autosatisfaction leur tient lieu de nécrologie anthume et
l’admiration niaise des nigauds leur tiendra lieu de nécro-coprologie. Et du
haut de leur sottise, ils nous toisent en nous prenant pour des idiots.
Passer pour un idiot aux yeux des imbéciles est
une volupté de fin gourmet, disait Georges Courteline. Régalons-nous donc.
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