Lectrices et lecteurs attentifs, bonjour. Ne le répétez pas mais je vous signale que j’avais annoncé aux auditeurs de la radio que je prenais des vacances, arrêtant ma production de chroniques et histoires dominicales. Mais je ne saurais faire défaut à mes lecteurs et je vais donc vous livrer chaque dimanche, dès 3 heures 30 le matin une petite chronique au gré du vent et de mon imagination.
Toutefois, comme mon imagination est parfois trop occupée, je me suis permis, cette année, d’appeler à l’aide deux auteures dont j’apprécie les écrits. Aujourd’hui encore, je vous livre une courte histoire écrite par Bettina, auteure qui habite en Bourgogne et qui est nouvelliste et romancière. Cette histoire s’intitule : « La théière fêlée. »
Il était une fois une maîtresse de maison qui possédait une vieille théière en terre. Cette théière lui venait de sa mère. Elle lui était très chère. Elle était donc sagement rangée sur son étagère. Mais la vieille théière n'était jamais contente de rien. Tout et tout le monde l'importunait, l'angoissait, la contrariait. Même le sucrier ne parvenait pas à la calmer.
Il n'y avait rien à faire. Tous les jours, elle était dans une colère noire. Il faisait trop chaud, ou trop froid, elle avait trop mangé ou pas assez, et les autres, surtout, ne faisaient jamais ce qu'elle voulait. Il y avait toujours un problème. Elle s'était tellement mise en colère depuis toujours qu'elle s'en était fêlée, à s'énerver ainsi pour un rien.
Plus personne ne s'en servait. Elle était dans un coin de placard, et restait ainsi, sans utilité à s'ennuyer. A tel point qu'un jour, la maîtresse de maison, fatiguée de la voir se lamenter et montrer son mauvais caractère, la sortit de son placard, alla cueillir quelques fleurs sèches et les disposa dans la théière sur un napperon de dentelle. La théière ne fut pas plus heureuse pour tout ça et continua à râler qu'on ne faisait d'elle aucun cas, qu'elle allait s'ennuyer comme ça. Elle râlait tant et tant qu'un jour, le chat noir de la maison, exaspéré de ne pouvoir faire sa sieste, passa près d'elle… un peu trop près, et la fit tomber comme par inadvertance. Elle gisait par terre, en mille morceaux, et plus capable de dire un seul mot. C'était bel et bien pour s'en débarrasser totalement qu'il avait agi ainsi. Le chat aime à dormir tranquille... Sa maîtresse osa donc enfin la jeter à la poubelle, sans regret, et toute la maison retrouva sa joie de vivre. Plus d'esprit grognon ni de colère. Plus de récriminations, d’esprit vengeur ni de lamentations. La maison ne fut plus que rires et chansons légères.
Cric crac, c’est tout et c’est une vraie histoire.
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