Le bon sens
est une variété de cognassier que nombre de gens affirment posséder dans leur
jardin mais méfions-nous des contrefaçons. Le plus redoutable bon sens est
celui que d’aucuns nomment bon sens
paysan car bien souvent il n’a rien ni de bon sens ni de paysan (comme
celui qui en parle car un vrai paysan ne parle pas de bon sens paysan, voyons !) mais cela
permet à celui qui déclare en être pourvu de dire ou de faire quelque stupidité
en la parant des habits d’une vérité terrienne supposée. Alors que la vérité,
comme l’on sait, aime à se promener toute nue… Laissons donc ces citadins à
leurs mythes.
Après ce
nécessaire préliminaire, voyons si le mieux est l’ennemi du bien. Notre exégète
nous avait expliqué que si le mieux est l’ennemi du bien, le mal, ennemi lui
aussi du bien, pourrait donc être l’ami du mieux et le mieux ainsi devenir plus
mal que bien ou réciproquement. C’est à ce moment-là qu’il nous a lâchés pour
fuir le minotaure.
Voyons ce
qu’il se passe de nos jours : on voit de partout des diplômés, des
sportifs de haut niveau, des chefs ainsi que des têtes pensantes prôner
l’excellence en tout : citius,
altius, fortius [2]devisait
Coubertinus. Et pourquoi, croyez-vous ? La réponse est simple : faire
plus, c’est s’autoriser à ne pas devoir faire assez ; faire mieux, c’est
s’exonérer de bien faire et le meilleur n’est bien souvent que l’absence du
bon. Un exemple ? Voyez ces Top
chefs que l’on exhibe sur les écrans, ils sont là pour montrer au bon
peuple tout ce qu’il n’aura pas et dont il n’a par ailleurs nul besoin. Tout
cela pour faire passer l’amère potion des légumes monsantisés, des viandes
hormonisées et des boissons frelatées que les sponsors vendent au consommateur
de base dans les supermarkets de la planète.
Vous avez
bien compris, le plus est une manière d’occulter le fait qu’il suffirait
d’avoir assez, le meilleur permet de dissimuler l’absence du bon et le mieux
est une façon de s’exonérer de ne pas être capable de bien faire. Un autre
exemple : voyez ces bordures de champs brûlées par le désherbant là où il
pourrait y avoir des herbes sauvages, des fleurs et des petits animaux. Il ne
suffit plus de désherber un champ, encore faut-il détruire la vie qui l’entoure…
on voit là que le bon sens paysan a ses limites, même chez le paysan. Le plus,
le mieux et le meilleur sont les diverses figures du trop que les classes
dirigeantes, scientifiques ou médiatiques nous infligent au détriment du
suffisant.
On voit
par-là qu’avec le culte du trop et le trop de culte l’effet se recule.
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