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jeudi 22 août 2019

Appelez-moi Fortunio (28)


-          Bofff, à deux heures du mat’, ça passe mais c’est un peu gros… Donc, Rosa lui dit, après lui avoir donné un sérieux coup de main cette semaine-là, qu’elle va rester encore un peu car il n’est pas bon qu’il travaille seul. Elle ne veut nulle rémunération, sera logée et nourrie aux bons soins de ses amis. Notre jeune homme, maçon de son métier, s’étonne, fait mine de tenter de comprendre : elle dit avoir besoin d’un break, de se changer les idées. Mais si cela importune franchement le jeune homme, maçon de son métier, elle ne s’imposera pas mais tout de même…
-          Et le jeune couillon, maçon de son métier, tombe en extase chantant Alléluia ! coupe René en vidant la troisième bouteille dans les verres.
-          Voilà qui est à peine exagéré, mon cher la-Science. Notre JHMDSM, passe-moi l’acronyme mais il faut que j’abrège, passe ainsi près de trois mois dans un mélange de doute et de félicité : certes, il est amoureux et ce n’est rien de le dire, bien sûr la demoiselle est pleine d’attentions amicales à son égard, toutefois notre JH et cetera ne sent jamais le moment opportun pour se déclarer. Jusqu’au jour où…
-          Ah quand même !
-          Oui, quand même il se décide, un soir où ils vont à une fête où ils sont conviés avec leurs clients et amis. L’occasion, l’herbe tendre, quelques verres de bon vin et un slow langoureux…
-          Elvis, Love me tender ?
-          Un peu vieux jeu, tout de même !
-          Les Stones, Angie ?
-          Non, ne cherche pas, un truc des Manhattan Transfer…
-          Oh ! Je vois, jolie romance ironique ! Wapadapadam, play encore, more and more… ah ah ah !
-          Bon, notre jeune homme se déclare. Elle ne veut pas rompre le charme et se laisse conter fleurette. La chanson se termine, une autre reprend et ils continuent à danser jusqu’à ce que la musique s’arrête. Ils s’enlacent, elle l’embrasse langoureusement sur les lèvres puis, abruptement lui dit bonsoir, le laissant planté là. Il revient vers ses pénates, la tête en feu et le cœur plein d’amour.
-          Waouh ! Il arrivera à s’endormir ?
-          Mais oui, avec son bonheur à fleur de rêve ! Et il se réveille le matin plus joyeux que jamais, il prend sa petite voiture et part acheter un bouquet de roses chez le premier fleuriste, à vingt kilomètres, quatre croissants et fouette cocher ! Le voilà de retour dans la maison en chantier où il a sa kitchenette et que trouve-t-il sur sa machine à café ?
-          Un paquet d’arabica moulu…
-          Meuh non, sot ! Une enveloppe avec son prénom et dans l’enveloppe, une lettre d’adieu, sans explication et qui se finit simplement par : un jour, peut-être.
-          Et les fleurs, alors ?
-          Jetées du haut du pont dans la vaste rivière…
-          L’amour s’écoule comme cette eau des montagnes… L’amour s’en va, Comme la vie est lente Et comme l’espérance est violente… Et en attendant ce jour, Zangra, heureusement que Christelle est passée par-là sinon tu serais en train de te morfondre dans quelque cave sombre ! Bon, on va devoir se pieuter si on veut se lever demain. Juste une chose : le vrai prénom de cette jeune fille, sa photo peut-être ?
-          Ni l’un ni l’autre, j’ai tout dit et ne dirai rien de plus, répond Albert. Tu as su me faire parler, bravo, mais ce qui est secret le restera.
(à suivre...)

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