En vedette !

jeudi 6 mai 2021

Dernier tableau (27)

– Comme je viens de le dire, j’aime certains tableaux, mais de manière instinctive, je n’ai rien d’un connaisseur, répond Hervé.

– Excusez-moi, monsieur Magre, vous allez me trouver bien indiscrète, je ne sais pas comment vous dire, j’ai fait le ménage hier chez vous et j’ai vu que vous avez un petit tableau… comment vous dire… c’est un original… je l’ai trouvé très beau… je sais, c’est très indiscret de ma part, mais est-ce que je pourrais vous demander de qui est cette jolie peinture ?

 

Hervé se sent un peu piégé, il n’avait pas pensé que le petit tableau attirerait l’attention de sa logeuse. Évidemment, l’œuvre est de qualité et Madame Lemond s’intéresse à la peinture, ce qu’il ignorait jusqu’à présent. Il veut rester discret.

 

– Ce petit tableau est en ma possession, mais il ne m’appartient pas vraiment, je l’ai en dépôt, si je puis dire, et je ne peux guère en dire plus. Même si cela peut vous paraître bizarre, je ne voudrais pas vous en parler sans l’accord de son propriétaire. Ce tableau a une certaine valeur, ce n’est pas un chef d’œuvre bien sûr, mais les belles œuvres attirent toujours les convoitises…

– Oh ! Rassurez-vous, je ne vous demande aucune explication. Simplement, je voulais vous dire que j’ai, bien indiscrètement je le reconnais, admiré cette peinture. Vous savez, la décoration de l’appartement est assez passe-partout, c’est un meublé ordinaire. Mais vous y avez mis une touche de bon goût.

– Monsieur Magre, intervient Sara, vous permettez que je vous appelle Hervé ?

– Je vous en prie, je vous en prie.

– Alors appelez-moi Sara si vous le voulez bien. Plus je vous entends parler de cette peinture, plus ma curiosité est éveillée et le serait à moins. Puis-je vous proposer une chose ? Je vous fais visiter mon atelier quand vous le voudrez et, en échange, vous me présentez votre tableau. Vous n’allez tout de même pas me refuser cela, dit-elle sur un ton câlin.

 

Sous ses boucles sombres, Sara a des yeux verts lumineux dont l’intensité fait fondre les dernières résistances qu’il aurait pu opposer. Il lui passe même par l’esprit qu’il pourrait lui proposer en prime une visite guidée et intime de son appartement. Il ravale cette pensée furtive d’un sourire amusé.

 

– Nous dirons que je ne peux rien vous refuser, répond-il.

– Ma porte vous est ouverte, venez quand vous voulez sauf le jeudi, c’est le jour où je donne des cours.

– Je pourrais peut-être venir avec Madame Lemond, un jeudi…

– Certainement pas, je dois être totalement disponible pour mes élèves à ce moment là. Connaissez-vous Saint-Lambaire extra-muros ?

– Je commence à connaître, et puis j’ai toujours un plan de la ville, dit-il en le sortant de sa poche. Si vous voulez bien me montrer où se trouve votre atelier.

– Voilà, Hervé, dit-elle en prenant le plan, vous descendez la rue Comédon, vous prenez les allées et vous traversez le square Tocqueville où vous prenez en face, légèrement à gauche, le boulevard Laparrat. Je suis dans la cinquième rue à droite, rue Onfray, au numéro 27. C’est facile à trouver, mais il faut une bonne demi-heure pour y aller à pied d’ici.

– Monsieur Magre est un vrai marcheur, une demi-heure de marche ne lui fait pas peur, assure Madame Lemond.

– Je ne sais pas si je suis un vrai marcheur, mais en effet une demi-heure de marche ne me rebute pas, réplique Hervé. Eh bien, au point où nous en sommes, voulez-vous que je vous le montre, ce tableau ?

– C’est vraiment très gentil de votre part, monsieur Magre, dit Madame Lemond.

– Je vous en prie, appelez-moi Hervé sinon vous me donnerez encore du monsieur alors que Sara m’appelle par mon prénom…

– Alors appelez-moi Édith, conclut-elle en se levant et en se dirigeant vers l’escalier.

 

Ils montent de conserve jusqu’à l’appartement. Hervé ouvre la porte et fait entrer les dames. Celles-ci vont directement vers le tableau.

 

– Ah oui, il est vraiment très intéressant, les couleurs sont belles et la perspective assez particulière. Vous connaissez le peintre ? demande Sara.

– Un peu, il est de la région, répond Hervé.

(à suivre)

 

What do you want to do ?
New mail
What do you want to do ?
New mail

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire