Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Si les média nous serinent tant de nouvelles de peu d’intérêt, c’est pour mieux éclipser ce qui, dans la vie de tous les jours, peut prendre une importance considérable. Heureusement, votre dévoué chroniqueur est là pour vous en parler et ne s’en prive pas. Il faut dire que, n’ayant pas de télévision, n’écoutant pas les informations à la radio et n’étant pas abonné aux journaux, il arrive à vivre sainement, écoutant le chant des oiseaux et regardant le spectacle de la nature. Toutefois, il peut arriver qu’il consulte un journal quotidien, principalement celui qui lui est fourni par un aimable voisin afin d’allumer sa cheminée.
Ce matin donc, avant de procéder à l’allumage, mon regard tombe sur une page datant du 21 juin 2019 où il est question, parmi d’autres, de Jérôme Cahuzac en Corse puis de Laeticia Hallyday à Lectoure. Et, en regardant mieux, je vois qu’il est aussi question d’une dame retraitée qui a appris sa mort par téléphone. Je vous expliquerai après pourquoi ce fait divers a particulièrement retenu mon attention.
Cette dame, retraitée de La Poste, avait été surprise de voir que, voulant faire le plein d’essence, sa carte de crédit ne fonctionnait pas. Elle pensait avoir été piratée et, consultant son compte bancaire, elle constata que sa retraite n’était plus versée… depuis le 1er avril ! Elle appelle son agence bancaire pour se faire dire qu’elle avait été déclarée morte par un notaire. En outre, une succession avait été ouverte à son nom. Ensuite, elle se retrouve avec une personne qui, au téléphone, lui demande de prouver qu’elle est bien vivante. Puis, elle a réussi à démêler cet imbroglio en arrivant à avoir des informations quant aux funérailles de son homonyme. Les pompes funèbres lui ont fait passer l’acte de décès accompagné d’un post-it où il lui était souhaité bonne chance. Ensuite, la caisse de retraite de l’État lui a fait savoir que les informations demandées seraient téléchargeables à l’automne. L’État, on le voit, s’y connaît en feuilles mortes…
Pour terminer, la direction des impôts s’est engagée à régulariser la situation pour fin juin, plus de trois mois avaient passé. Et durant ce temps-là, la banque avait fait courir les agios. Mais, sur la photo du quotidien, notre retraitée garde le sourire.
Bien sûr, vous me direz que ce sont là des mésaventures rares et qui n’arrivent qu’aux autres. Détrompez-vous car cela m’est arrivé il y a plus de quinze ans de cela. Je reçois un jour au courrier mon avis d’impôt sur le revenu. Comme beaucoup d’entre nous, je me reporte aussitôt à la dernière ligne de la dernière page pour constater que le montant exigé dépassait le montant de mon revenu brut annuel. C’était à n’y rien comprendre. Je regarde encore l’en-tête de la feuille : elle était bien libellée à mon nom. Enfin, pas vraiment car si mon nom figurait, c’était en tant que « Succession Pépé J » et, moi vous me connaissez, je réfléchis vite mais il me faut du temps : en lisant bien ma feuille d’impôt, on constate, au milieu de la deuxième page, une sorte de hiatus comme si le fonctionnaire qui avait commencé à la remplir avait tout à coup constaté que l’heure de la sortie avait sonné et avait repris la feuille le lendemain et y avait mis les éléments d’une autre personne, fortunée quoique décédée. C’était bien gros et je me propulsai dès le lendemain matin au centre des impôts d’Agen avec ma feuille. La personne au guichet, outre qu’elle était fort aimable, ne manquait pas d’humour puisqu’elle m’a dit, avec un sourire entendu, qu’elle ne me demandait pas de prouver que j’étais encore en vie. La rapidité de mon intervention a permis de régulariser dans les meilleurs délais cette affaire et ma résurrection m’avait donné du baume au cœur. J’eus toutefois une pensée émue pour le contribuable décédé qui était venu interférer chez moi : le pauvre homme était mort bien riche, laissant ses héritiers se débrouiller avec le fisc.
On voit par-là que demain ne meurt jamais.
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