J’aurais
voulu, dès lundi, parler de l’air qui me semblait plus pur depuis la veille au
soir mais on m’a conseillé de n’en rien faire. Parler de l’air pur pousse à
lever le nez vers le ciel, et les yeux aussi. Alors qu’il vaudrait mieux porter
les yeux là où l’on marche car l’on risque encore de mettre le pied dedans.
Nous nous poserons plutôt des questions sur les intervalles.
A l’école,
quand la maîtresse disait : « Ernest a fait une clôture avec dix
piquets distants de trois mètres. Quelle est la longueur de la
clôture ? », même s’il y avait toujours un bon élève pour donner la
bonne réponse après un temps de réflexion, un grand nombre d’entre nous se
précipitait pour répondre : « trente mètres, m’dame ». Et
nous ignorions qu’au-delà de notre erreur la maîtresse nous posait une question
térébrante. Analogue au paradoxe d’Achille et de la tortue.
En effet,
deux piquets et un seul intervalle… trois piquets et deux intervalles (et non
pas des interveaux sauf dans le cas où l’on décrit les espaces séparant de très
jeunes bovins), quatre piquets et trois intervalles et ainsi de suite jusqu’à
nous prouver que la clôture d’Ernest mesure vingt-sept mètres… Mais on constate
que si dans le cas des deux piquets, les piquets sont deux fois plus nombreux
que l’intervalle, ce rapport va décroissant alors que croît le nombre de
piquets. Où va-t-on ainsi ? Le nombre d’intervalles croissant avec le
nombre de piquets, se trouvera-t-il un jour où les intervalles auront rattrapé
les piquets ? Admettons qu’un piquet trébuche et il se trouvera – qui
sait ?- un jour où les intervalles dépasseront les piquets. En nombre,
comme il se doit. Jusqu’à ce jour, les piquets ont tenu bon mais un accident
est si vite arrivé.
De nos
jours, la sécurité n’a jamais été aussi grande et il y a peu de chances pour
qu’un tel accident survienne. Mais le calendrier maya, garant d’une certaine
insécurité, aurait prévu la fin du monde au cas où les intervalles en auraient
marre de leur statut d’éternels seconds et dépasseraient en nombre celui des
piquets.
On voit
par là que plus la fin du monde approche, moins elle s’éloigne et que
l’intervalle de temps qui nous en sépare devient de moins en moins grand au fur
et à mesure qu’il s’amenuise.
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