En vedette !

dimanche 18 mars 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs III (25)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Ma mère océane, c’est une Garonne chantait Claude Nougaro. La première fois que j’ai entendu cette chanson, il était sept heures un matin d’août il y a quelques 25 années, dans ma petite voiture en arrivant en haut de Castels à Valence d’Agen. Devant moi s’étalait la plaine de Garonne se couvrant de vapeurs au soleil levant, les formidables tours de Golfech et la petite cité sortant de son sommeil. Le spectacle sonore tenait du hasard merveilleux. Je dus m’arrêter, sortir de la voiture et sentir toute la vigueur du fleuve qui coule des Pyrénées à Toulouse et s’étale vers Agen puis Bordeaux pour devenir Gironde jusqu’à la Pointe de Grave. Le puissant fleuve y joue le bras de fer du mascaret avec l’océan pendant les grandes marées. Il est renforcé par la Dordogne qui l’alimente au Bec d’Ambès des eaux du Massif Central. Remontons le et, à notre gauche, nous voyons confluer le Lot, si beau dans ses sinuosités quercynoises puis à droite la Baïse si modeste qu’elle couvre son nom d’un joli tréma, qu’elle soit Petite Baïse ou Baïse Devant comme à Lannemezan.
Je ne citerai pas tous ses affluents mais après la Baïse, à notre droite qui est la gauche du fleuve, voilà le Gers sous Layrac, dont a parlé Jacques Sadoul qui écrivait : « Entre les coteaux de F., les méandres du Gers et le village d’A., s’étend le domaine de R., celui-là même où dès le haut Moyen Age se livrèrent, dit-on, tant de sacrilèges sorcelleries. Dans le pays, on évite d’en parler, on se dérobe aux questions des curieux. » Ce Gers mystérieux dont la vallée est si propice aux maléfices du redoutable Lodaüs, personnage aussi fascinant qu’anagrammatique et dont je parlerai, j’espère, bientôt.
Reprenons notre remontée de la Garonne avec, à gauche, la Séoune, discrète elle aussi mais que je ne peux m’empêcher de citer car son affluent l’Escorneboeuf remonte lui aussi une vallée thaumaturgique  avec Saint Maurin et son céphalophore et, en remontant les petits affluents dont l’énigmatique ruisseau du Furet, on arrive sur les herbages du chroniqueur par les canyons de l’ombrageuse Gatte.
Mais foin de nostalgie ou de chauvinisme et continuons à remonter le cours de notre mère océane : après la Barguelonne et son mignon pont canal, voilà le Tarn avec son giboyeux plan d’eau et, en le remontant lui-même un peu, on trouve un endroit unique au monde, un riverain me l’a attesté : c’est bien le seul lieu au monde où l’Aveyron se jette dans le Tarn. Nous laisserons ensuite le haut du cours de notre fleuve avec la Save, le Touch, l’Ariège ou la Neste, cette Garonne qui, du Pont d’Aquitaine au Pont-Neuf sera passée aussi sous le majestueux Pont Canal d’Agen et sous l’aérienne passerelle qui relie Agen au Passage et où, certaines nuits, la jubilation des amants emportés dans cette promenade romantique au-dessus des flots, les met en accord avec la nature généreuse de la frayère d’aloses.
Les êtres humains, à l’instar de Vénus, sont aussi nés de l’écume de la mer et c’est seulement en remontant le cours des fleuves qu’ils ont pu découvrir puis s’approprier les terres : les conquistadors sur l’Amazone ou l’Orénoque et ces explorateurs qui ont tant cherché les sources du Nil. Sans oublier Stanley remontant le fleuve Congo, retrouvant Livingstone et le saluant avec une urbanité toute britannique au milieu des indigènes d’Afrique : « Dr Livingstone, I presume ? »
Toujours les grands fleuves furent les artères de notre planète, tutoyant les mers et taquinant les océans, donnant à qui savait leur parler la connaissance du monde intérieur.
On voit par-là que La Garonne n'a pas voulu, Lanturlu! Quitter le pays de Gascogne.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire