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dimanche 6 septembre 2020

Contes et histoires de Pépé J (1)

Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Une année radiophonique nouvelle commence et, dans le but d’économiser les ressources naturelles de l’univers, je me contenterai de vous raconter des histoires de notre paysage social rural. Du rustique le plus profond au fantastique le plus aérien, de la vérité la plus certaine au rêve le plus étrange, partons en voyage au cœur de ma campagne. Je commencerai par une histoire simple mais représentative de ce qui se racontait à table à l’époque du foin et de la paille en bottes de basse ou moyenne densité, je l’ai déjà racontée dans un de mes romans, ils sont à table :

« — Tu te souviens du père Ransinangue ?

— Oui, le vieux qui gardait son troupeau, des vaches et des moutons, avec son chien et son journal le petit bleu ! Et ses sourcils en broussaille !

— Alors, je vais te raconter l’histoire de Traouquesègue. Je te la livre pour ce qu’elle m’a été donnée, bien sûr, c’est le Robinou qui me l’a racontée, le fils Ransinangue. Tu l’as connu, lui ?

— Non, j’ai peut-être su qu’il y avait un fils, je ne peux plus dire…

— Il devait être à l’armée à l’époque, il avait quatre ou cinq ans de plus que nous mais j’ai beaucoup travaillé avec lui après et il m’a livré un tas de potins et autres. Donc, rapidement, l’histoire de Traouquesègue : tu sais, dans la combe qui descend derrière chez Ransinangue, la combe de Busc, au fond il y avait un ruisseau, on y mettait des balances, on pêchait les écrevisses…

— Tu parles que je me souviens, on appâtait avec de la tête de mouton faisandée, aromatisée au Pernod ! On le piquait en cachette à ton vieux !

— La recette du vieux Trabuc, quand tu penses que maintenant y’a plus que des américaines, plus une écrevisse d’Europe… enfin, ça marchait bien, on s’est régalés à l’époque…

— Bon, mais, au fait, cette histoire de traouquesègue ?

— Oui, je m’égare. Donc le père Ransinangue gardait son troupeau, un après-midi, dans la combe de Busc. Un peu plus bas, derrière la haie, le vieux Mautaret gardait les vaches lui aussi. Bon, mais tu sais bien, c’était chacun chez soi et puis, ils circulaient, ils faisaient le tour de leurs parcelles et pas question de mélanger les troupeaux, ça aurait foutu le bordel, les chiens et tout, quoi ! Donc, ils étaient là, tranquillot’s, et mon Ransinangue entend des cris, Henri Lomis on aurait dit. Bon, mais tu sais, pas de quoi s’affoler, il avait la voix qui portait, le Henri, et la gueulante facile. Disons quand même que le Ransinangue se marrait déjà à l’intérieur, quand il voit d’un coup un bolide qui traverse la haie, la sègue en patois. Je te dis pas, ronces et tout, c’était le fils Mautaret. Et il a aussi traversé la haie d’en dessous, vers chez lui, le pré où son père gardait les vaches. Mais il s’est pas attardé, y’avait urgence car le Henri Lomis arrivait derrière, mais celui-là, il ne s’est pas déchiré dans les ronciers, il a fait le tour par les passages et il a pris du retard sur le Milou, le fils Mautaret. Il traverse le pré de Ransinangue, il arrive dans celui de Mautaret et tombe sur Mautaret père. Ni une ni deux, il te lui fout un coup de poing dans la gueule et l’autre part dans les pommes. « Tu diras à ton drôle qu’il laisse ma femme tranquille » qu’il crie l’Henri avant de remonter chez lui. Bon, il avait surpris le Milou avec sa femme mais le Milou, il l’avait pas prise par surprise la Germaine, elle était bien d’accord. Enfin, toujours est-il qu’il doit s’en souvenir, le Milou, on ne traverse pas deux haies à cette vitesse sans en garder un souvenir ému. Mais tu peux toujours lui poser la question, il ne te dira rien, il te dira que c’est faux mais je suis certain que c’est vrai, heureusement que Robinou m’a raconté cette histoire. Nous, le Milou après cela, on le surnommait Traouquesègue, mais il a toujours fait semblant de ne rien entendre. Voilà, c’est tout mais c’est une histoire vraie. »

 

 

 

 

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