Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Parmi ces livres que je considère comme des trésors, je citerai un roman de Fernande Costes « Brameloup, l’étranger ». Fernande Costes n’est certes pas une auteure oubliée car elle est souvent citée dans les monographies concernant le château de Bonaguil dont elle fut le premier guide. Elle devint officiellement aussi conservateur du château. Fernande Costes a bien connu Bonaguil puisqu’elle vint y habiter à l’âge de 5 ans avec ses parents qui y tenaient une petite épicerie. Elle a écrit un autre récit « Bonaguil ou le château fou » dont j’espère pouvoir vous parler plus tard.
Qui donc est cet étranger qui, un jour de 1919, arrive dans le petit village de Bonneroque ? Un homme qui ne dit pas son nom et qui ne parle pas de son passé. L’aubergiste, homme avenant, lui permet de passer une première nuit dans le foin de sa grange car l’homme ne veut pas d’une chambre. Non seulement il craint de ne pouvoir se la payer mais encore il vient de passer quatre années dans les tranchées. Il était berger de haute montagne en Provence et il s’est retrouvé dans la bataille, le sang, les obus, les baïonnettes et la boue. Il sait donc ce que c’est de coucher à la dure. Et surtout, il veut comprendre. Comprendre pourquoi les hommes ne peuvent s’empêcher de faire la guerre et quel besoin ils ont toujours de s’affronter.
Il passe donc une nuit près de l’auberge puis le lendemain, il visite les environs. Le village de Bonneroque est surmonté d’un formidable château-fort et l’étranger se pose encore des questions : pourquoi de telles forteresses sinon pour faire la guerre, ici aux confins du Périgord et du Quercy ? Le château occupera peu de place dans l’histoire car l’étranger va chercher à s’intégrer, tant bien que mal, dans la petite communauté rurale composée de paysans propriétaires de leurs fermes dont ils vivent durement. Il rencontre un couple âgé qui lui prêtera une fermette en ruine. Ce couple qui vit de peu fait partie de ces gens qui aiment tout : leur terre, leur vie, les autres. La fermette a pour nom Brameloup et ce sera donc celui qui sera attribué à l’étranger, comme c’est souvent le cas à la campagne.
Brameloup se propose chez les uns et les autres pour les travaux des champs ou du bois. Il est robuste et donc apprécié pour cela. De plus, il ne demande pas d’argent, seulement la nourriture ou quelque échange. Il va donc être un peu « accepté » par les habitants, mieux par les uns que par les autres. Car l’étranger, même si on le nomme Brameloup, reste un étranger et d’aucuns le lui font sentir parfois vertement. Ce qui ne compte pas pour rien, c’est que Brameloup est bel homme, les femmes le regardent avec un intérêt plus ou moins dissimulé et bien des hommes avec jalousie, soit qu’ils veillent sur leur épouse soit qu’ils voient un rival possible. Parce qu’en plus, on ne lui connait nulle relation, ce qui est encore plus suspect.
Et avec l’étranger, il y a son chien, Verdun. Il est comme son maitre, calme, méfiant mais courtois. Il ne cherche pas la bagarre. Le chien a aussi connu la guerre et il a connu son maitre sous les bombes. Et il finira sa vie victime de cette guerre que les humains ne peuvent s’empêcher de trainer derrière eux. Les humains en général, pas tous…
De 19 à 39, vingt années à chercher pourquoi les hommes sont ainsi. Le roman se termine à l’aube crépusculaire de la deuxième guerre mondiale. Sans réponse.
Cric crac, c’est tout et c’est une vraie histoire.
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