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jeudi 9 décembre 2021

Dernier tableau (54)

Je suis impardonnable, dit Fred en remplissant le verre d’Hervé puis le sien. Au rythme où nous sommes partis, je vais commander une autre bouteille, cela facilitera vos aveux.

– Bonne idée, mais essayons de rester lucides néanmoins. Où en étions-nous avant que vous ne traitiez ce pauvre Marondeau de pédale ?

– Je n’ai pas dit pédale, j’ai seulement parlé, affectueusement, de vieille tante. Il y a une nuance et elle est de taille ! Vous parliez d’un tableau que vous possédez.

– Et je n’aimerais pas que vous en parliez, que vous disiez que je suis possesseur d’un tableau qui a tout de même une certaine valeur.

– Si je comprends bien, vous n’êtes pas assuré ?

– Il ne s’agit pas de cela, je n’ai pas envie que cela se sache, vous comprendrez avec la suite de mon histoire. Madame Secondat, par exemple, ne le sait pas. Et je ne tiens pas à ce qu’elle soit au courant.

– Bon, mais si je ne peux rien dire, je vais rester en carafe avec mon article.

– Je continue. Ce Leyden est de petites dimensions et, ce qui en fait une curiosité, c’est que ce n’est pas une marine mais un paysage !

– En effet, je crois que Leyden a surtout peint des marines.

– Pas surtout ! Il est censé n’avoir peint que des marines et peu de gens savent qu’il existe un paysage peint par lui.

– D’accord, d’accord, mais ce n’est pas le scoop de l’année !

– Non, mais ce qui en est un, c’est que j’ai acquis ce tableau en pensant acquérir un petit paysage de Leyden et que, en voulant le faire ré encadrer, je me suis rendu compte que le tableau était deux. J’en avais eu deux pour le – petit – prix d’un seul. Et le second n’est ni un paysage, ni une marine, mais un portrait.

– Et de cela, vous ne voulez pas plus que j’en parle ?

– Évidemment.

– Pauvre de moi !

– Donc, me voilà propriétaire de deux Leyden, et cela non plus n’est pas un scoop inoubliable, quoique… Mais voilà que j’ai trouvé l’endroit qui a été peint par Leyden.

– Ah, ça c’est plus amusant. Mais cela a été peint il y a plus de cinquante ans, je suppose. Les lieux n’ont pas changé avec le temps ?

– Non, il s’agit d’une petite ferme du côté de La Brémarde, cette ferme est restée dans son jus, les arbres ont poussé…

– Du côté de La Brémarde ? Et elle s’appelle comment ?

– Le Bussiau. C’est un coin un peu perdu, il faut vraiment se perdre pour y aller d’ailleurs et c’est ce qui m’est arrivé.

– Attendez, nous habitons à La Brémarde, une maison qui était à un oncle de ma femme et dont elle a hérité. Le Bussiau, je ne vois pas trop, je ne connais pas ce nom mais ma femme devrait connaître.


Hervé se met à raconter dans quelles circonstances il a découvert Le Bussiau. Ainsi que les rencontres qui ont suivi, les discussions avec Eugène, Gégé, Dédé, Zézé. Et l’épisode chez l’encadreur, la discussion avec Antonia puis avec l’ancien instituteur.


– Vous avez été bien inconscient de vous promener comme cela au moment où la marée monte. On voit bien que vous venez de Paris, déclare Tucaume.

– Et qui vous dit que Leyden n’a pas découvert Le Bussiau de la même manière que moi ?

– Je ne peux pas le croire, Leyden était du pays et il connaissait la côte à fond.

– D’accord, je ne peux pas vous contredire sur ce point. Le seul personnage qui a peut-être quelque chose à raconter, c’est Achille Trouvé.

– Bien, votre histoire est assez passionnante, mais qu’est-ce que cela vous apporte de chercher et qu’est-ce que vous voulez savoir au juste ?

– Bonnes questions ! répond Hervé. Je fais cela pour le fun, je n’ai rien à gagner mais j’ai du temps et j’ai vraiment envie d’en savoir plus.

(à suivre...)


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