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jeudi 24 février 2022

Dernier tableau (65)

 

– Si tu savais dans quoi j’ai pu rouler, tu rigolerais. Va pour ta voiture de bonne sœur des années 80, au moins on sera à l’abri de la pluie. Je récupère ma veste, dit-il en la cherchant dans le sac. Tu as acheté un journal ?

– C’est le Courrier d’Émeraude d’aujourd’hui, il y a un article sur la cérémonie de dimanche, ton ami journaliste a tenu sa parole, l’article est bien et reste discret : il parle de Jules, garagiste retraité. Pas mal comme surnom, je me demande si je ne pourrais pas t’appeler Jules dans l’intimité.

– Excellente idée : Jules, le spécialiste de la pêche à la morue…

– On ne peut pas plaisanter avec toi, il faut toujours que tu en rajoutes, conclut-elle en souriant.


Ils descendent et Sara démarre son bolide du siècle dernier. Ils passent chez elle et repartent en direction du bord de mer. La voiture garée, ils partent à pied en longeant la plage. Le temps est toujours gris et par moments des embruns venus de l’océan viennent les entourer, ils se sentent grisés par le vent, la brume et la nouveauté de leur rencontre. Ils marchent longuement, par instants la main dans la main, puis reviennent vers la voiture. Ils n’ont pas vu passer le temps, il est plus de quatorze heures. En revenant, ils passent devant un petit restaurant de fruits de mer où on accepte encore de les servir.

Sara reconduit Hervé rue Équoignon. Ils montent chez lui, ils font de nouveau l’amour puis Hervé prépare du café.


– Je ne vois plus ton petit tableau de Leyden, il est toujours à Morlaix chez l’encadreur ?

– Oui, je vais aller le chercher un de ces jours, il devrait être prêt. Je passerai un coup de fil à monsieur Dussieu et si le tableau est prêt, j’irai.

– Si tu ne veux pas y aller un jeudi, on peut y aller ensemble avec ma voiture. Ce serait avec grand plaisir…

– Justement, j’espérais pouvoir y aller demain jeudi. Je vais voir, il ne faut pas surmener ta vaillante pétrolette !

– Oh, arrête avec ma voiture. Et puis, vas-y tout seul si tu veux, je propose et tu disposes…


Hervé se soucie peu d’aller chercher le tableau avec Sara. Il a évité d’en parler, il ne sait pas trop pourquoi. Il ne continuera pourtant pas à planquer le second tableau chaque fois que Sara viendra, il faudra bien en parler un jour.


– Je renouvelle ma demande, c’est sérieux, j’aimerais bien que tu me donnes l’autorisation de copier ton tableau. Je ne sais pas si j’y arriverai, mais j’aimerais que tu m’autorises à travailler à cette copie. En plus, cela me donnerait l’occasion de venir chez toi, tout à fait officiellement…

– D’accord, j’ai eu l’occasion d’y réfléchir et cela peut se faire. Je suppose que nous devrons faire un papier en bonne et due forme, non ?

– Oui, bien sûr. On fera cela quand tu auras récupéré ton tableau.


Sara se lève, l’embrasse et repart chez elle. Hervé a soudain l’impression d’un grand vide. Leyden est entré comme un intrus dans sa vie et maintenant cette Sara qui s’impose, presque, à lui. Il se dit qu’il faut qu’il fasse le point. C’est à ce moment que le téléphone sonne. Il décroche.


– Monsieur Magre ?

– Oui, c’est moi.

– Dussieu de Morlaix, vous savez, l’encadreur…

– Oui, bien sûr, bonsoir monsieur Dussieu. Comment allez-vous ?

– Bien, bien. J’avais promis de vous appeler si je trouvais quelque chose. J’ai retrouvé, dans les carnets de mon père, j’ai retrouvé le client qui a commandé le cadre, ce cadre double…

– Ah. Et qui est-ce ?

– Inconnu au bataillon. Un certain Vermorec. Vous connaissez ?

(à suivre...)

 

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