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jeudi 20 novembre 2014

Le cabot de Fortunio (20)

-          Pratiquement, oui. Pourtant, j’ai du mal à avaler que Robico, chirurgien, ait pu croire que son acheteur s’appelait comme cela. Ou alors, ils étaient de mèche, mais quel
-          intérêt ?
-          Peut-être avait-il absolument besoin de vendre sa caisse, dans ce cas, il a pu ne pas être très regardant…
-          Admettons. Reste le chien, la coïncidence est plus que troublante car le chien a bien été enregistré par un vétérinaire d’Angoulême avec comme propriétaire un nommé Robico.
-          Oui. Et votre chef, ça ne le trouble pas plus que cela ?
-          Mon chef s’appelle Padhovak mais on le surnomme « pas de vagues » si vous voyez… et Angoulême lui a conseillé de mettre la pédale très, très, très douce !
-          Alors, buvons un coup à la santé de Flèche, elle aura au moins gagné cela !
-          Oui, prosit Flèche ! A ce propos, je ne suis pas venu vous voir juste pour vous raconter que je n’avais rien à raconter. En fait, j’en sais un peu plus par un collègue de Charente. Robico est connu comme le loup blanc à Angoulême, chirurgien et gendre de la plus grosse fortune locale. Il a épousé Mademoiselle de Laglande et son fric. Ce n’est pas un aigle mais il a un poste de chef de service plus un cabinet en ville. C’est aussi un fêtard et il se murmure que le chirurgien n’a pas toujours la main sûre. Il y a aussi une histoire qui a couru sur lui. Il s’affichait ouvertement avec une maîtresse, un peu trop ouvertement même. Maîtresse qui lui avait allègrement soutiré un gros paquet de fric. Madame Robico n’a pas apprécié la publicité et elle aurait coupé les vivres à son mari…
-          Elle a coupé le robico, en quelque sorte. Excusez-moi mais celle-là, il fallait que je la place...
-          Ah ah, oui. Le chirurgien aurait donc cédé et promis de s’acheter une conduite. Mais, toujours d’après mon collègue, il aurait une autre maîtresse. Bien plus discrète et bien moins gourmande aussi…
-          Une conduite intérieure, si je comprends bien !
-          Si c’est vous qui me sortez des astuces de gendarme, où va-t-on, je vous le demande ?
-          Continuez, je promets de ne pas recommencer.
-          Donc, mon collègue est bien au courant car ses parents habitent dans le même village, à deux pas, de chez la dame. Un patelin qui s’appelle Verneuil. Elle a une belle maison dans un parc, certainement des moyens financiers, et un chien. Je n’en sais pas plus mais c’est déjà pas mal.
-          D’accord, mais si l’enquête est enterrée…
-          Rien ne nous empêche de continuer à nous renseigner !
-          Vous continueriez l’enquête en free-lance ? Détective privé, en quelque sorte…
-          Oui, si on veut. Mais pas tout seul, j’ai dit nous renseigner !
-          Ah, parce que vous embauchez en plus ! Moi, je ne suis qu’un simple maçon, pas un enquêteur, à chacun son métier !
-          Disons que le jour où je construirai une maison, vous m’apprendrez à maçonner et moi, je vous apprends à enquêter !
-          Ah non, j’ai pas le temps de m’occuper de ça, moi. Déjà que j’ai un chien maintenant et ça n’est pas rien. Qu’est-ce qui vous permet de croire que je vais m’embringuer dans ce truc ?
-          J’ai un petit doigt, moi aussi. Et il est plus malin que celui à Queutard, si vous voyez.

Nous nous regardons quelques secondes les yeux dans les yeux. Je ne peux croire que Juliette lui ait parlé, ce flic n’en sait sans aucun doute pas plus que cela mais c’est un malin ou il a du flair. Un ange passe, les ailes chargées d’avanies. Et quand les avanies commencent à tomber en pluie, y’aurait intérêt à se planquer. Mais Fortunio est du genre à partir à découvert…

-          Disons que nous voilà associés, alors, dis-je. Qu’attendez-vous de moi ?
-          Qu’on se tutoie, d’abord. Ensuite, c’est pas compliqué. Il faut se renseigner sur le chien.
-          Mais qu’y-a-t-il à glaner de ce côté-là ? Madame Robico a répondu au chenil qu’ils n’avaient pas de chien.
-          Ce chien est, à ce que j’ai compris, un chien d’une race assez rare en France. Il faut se renseigner auprès du club de la race, il est peut-être au Lof, le livre des origines.
-          Ah, je n’y avais pas pensé et pourtant, la jeune femme du chenil me l’avait dit, c’est un snotenberg, une race de l’ex-RDA.
-          Il faut se renseigner, on va trouver sur internet. Il y a bien une société centrale canine et des clubs de race. Ce qu’il faut rechercher, c’est le président du club des snotenberg. Tu vas le voir avec le chien…
-          Oh oh, doucement, je ne vais pas galoper dans toute la France pour cette histoire de bagnole en confettis !
-          Oui, oui, je comprends. Bon, tu as internet ?
-          Oui, réponds-je mollement.
-          Allons voir. Si ça en tombe, il y a des éleveurs pas loin d’ici.
Je vais allumer mon ordinateur en traînant un peu les pieds et nous commençons à chercher. Coup de bol pour nous, le président du snotenberg habite dans le Médoc, Livron insiste pour que je l’appelle illico et, dans le feu de l’action, je prends rendez-vous avec lui pour demain mardi.
Nous finissons nos verres et Livron, qui est libre le lendemain, viendra me rejoindre et nous irons ensemble.


*
(à suivre...)

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