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jeudi 27 novembre 2014

Le cabot de Fortunio (21)

Je m’attendais à trouver le président en question dans quelque petit château médocain et nous arrivons dans une modeste fermette où une dizaine de toutous nous accueillent. Le président est un personnage fort convivial et lorsque je lui explique que Flèche est un chien trouvé, il se marre carrément.
-          Vous avez vraiment du bol, un chien comme celui-là peut coûter plus de deux-mille Euros. Mais il ne vient pas de chez moi, ça j’en suis sûr et certain. Je n’ai pas un gros élevage, je me souviens de tous les chiens que je vends, ou presque. Vous devriez essayer du côté de chez Sadilon, il en vend à la pelle. Il est plus marchand qu’éleveur, lui. Il a raflé le maximum de chien en ex-RDA après la chute du mur. A l’époque, les gars là-bas étaient contents de vendre, les prix leurs semblaient élevés mais ils ont regretté après. Enfin, bon, allez le voir si vous voulez, il est dans le Tarn. Je vais vous passer ses coordonnées mais inutile d’y aller de ma part, on n’est pas spécialement copains. Lui, c’est le genre à se faire du fric en vendant des snotenbergs à des snobinards en leur faisant l’article sur le chien rarissime, la race en voie d’extinction et le toutim. Il vend très cher des chiens pas toujours dans le standard de la race. Les gens rêvent qu’ils vont devenir éleveurs et qu’ils vont s’en mettre plein les poches en les faisant se reproduire. On ne s’improvise pas éleveur, vous savez. Enfin, trêve de cancans, je commence à jouer les mauvaises langues. Quoiqu’il en soit, votre chienne est bien conformée, vous pourriez la faire porter, recontactez-moi quand elle aura ses chaleurs si cela vous dit. Ça serait dommage qu’elle vous fasse des bâtards.
-          Je dois dire que je n’y ai absolument pas pensé, on verra, dis-je. Vous avez l’adresse de ce Monsieur Sadilon ?
Il prend un papier et note l’adresse et le numéro de téléphone. Nous prenons congé et repartons.
-          Maintenant qu’on est partis en branlère, on va chez ce Sadilon ? demandé-je à Livron.
-          Allons-y, ma femme travaille et ne revient pas à midi. Donnez-moi le papier, je vais appeler pour voir s’il peut nous recevoir.
Livron appelle le gars qui accepte de nous recevoir à deux heures.
-          Bien, dit-il, il ne faut pas traîner, c’est après Gaillac. On va se trouver un restau avant d’arriver, c’est moi qui invite, bien sûr.
Le restaurant nous déçoit un peu, inutile donc de préciser où il se trouve. Et à deux heures, nous sommes chez le Sadilon en question. Les lieux sont beaucoup plus luxueux, une grosse maison bourgeoise avec de vastes dépendances, façades garnies de lierre, deux ou trois chevaux dans un pré à l’arrière, un seul chien dans la cour et le propriétaire habillé style gentleman-farmer. Lorsque je lui explique le but de notre visite, il nous toise de haut, comprenant que nous n’étions pas venus en acheteurs. Il consent quand même à jeter un œil sur ma Flèche mais ne semble pas savoir si ce chien vient de chez lui. Seulement, lorsque je précise que son nom d’origine est Kara, il se trouble un peu. Il se ressaisit en reconnaissant qu’il est possible qu’elle vienne de son élevage. Il en vend tellement !
-          Mais votre élevage n’est pas sur place ? demande Livron.
-          J’ai quelques femelles ici et j’ai une métairie où se trouve mon élevage. Vous dites que vous avez trouvé ce chien ?
-          Je l’ai trouvé, porté au chenil départemental et finalement gardé. Le tout parfaitement en règle…
-          Mais il a une puce, ils n’ont pas cherché son propriétaire ?
-          Si mais il semble qu’il ait disparu et sa femme, contactée par téléphone, affirme qu’ils n’ont jamais eu de chien.
-          Et comment s’appelle-t-elle, cette dame ?
-          Euh, on ne m’a pas donné le nom, dis-je après un moment d’hésitation et en espérant que Livron ne me démentira pas.
-          Bon, en tout cas vous avez une assez belle chienne. Quelques défauts peut-être mais si vous voulez la vendre, je pourrais peut-être vous l’acheter…
-          Ça vaut cher un chien comme ça ?
-          N’exagérons rien, il n’est pas lofé. Trois ou quatre cents euros peut-être…
-          Ah oui quand même ! C’est une belle somme, dis-je faussement naïf. J’y réfléchirai.
-          Bien, vous avez mes coordonnées, n’hésitez pas à m’appeler. Excusez-moi maintenant mais j’ai à faire et je suppose que vous aussi.

Nous comprenons que l’entretien est terminé et nous dirigeons vers mon fourgon.
(à suivre...)

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