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jeudi 26 novembre 2015

Le cabot de Fortunio (73)

-          Tu vas pas partir comme ça tout seul derrière ces tueurs. Note, je comprends et si je pouvais, je viendrais avec toi. Mais, dis-donc, si Eliane t’en a parlé, elle a bien dû te dire qu’elle avait toujours le browning de son père ?
-          Oui, mais c’est une autre histoire et depuis elle ne l’a plus.
-          C’est toi qui l’as ?
-          Non. Ecoute, Tonin, je te raconterai tout cela un jour, je te le promets. Cela dit, tu dis oui ou tu dis non ? J’ai besoin de savoir. De toute façon, je trouverai une arme, c’est certain !
-          Bon, on va dire que c’est pour la bonne cause. Mais fais attention à toi, fils. Comment tu vas faire, tout seul ?
-          Tonin, je ne sais pas encore mais je vais trouver. Et surtout, ne dis rien à personne, pas même à François : c’est pas que j’ai pas confiance en lui mais il ne faut pas le mouiller dans cette affaire. D’accord ?
-          Tu as raison et si j’avais quarante ans de moins, je ferais comme toi. Il y a le browning et des munitions, le tout est en principe en bon état. C’est bien planqué, tu vas voir, on y va, tu m’aideras.
Nous montons dans le grenier. Une maigre ampoule nous permet à peine d’y voir dans le capharnaüm qui y règne mais Tonin s’est équipé d’une bonne torche. Il se dirige vers un ancien conduit de cheminée en brique pleines. Une d’entre elles est descellée, il la sort mais on ne voit rien. Il passe le bras à l’intérieur et ramène le bout d’un fil nylon. Il tire, il en vient une dizaine de mètres puis il sort un paquet.
-          Tu comprends, le paquet venait juste un peu au-dessus de la cheminée de la buanderie. En cas de nécessité, il suffisait d’arracher le cache pour le récupérer sans aller au grenier. Système rapido…
Nous redescendons du grenier et il défait le paquet dans la chambre d’Eliane. Il y a bien un browning et un nombre respectable de cartouches. Le flingue paraît impeccable. Tonin me met le tout dans une discrète petite sacoche puis il part se coucher. J’en fais autant.
Cela me fait une impression étrange de dormir dans ce lit, dans cette chambre. Ne serait un léger relent de cigarette, on se croirait dans une chambre d’enfant. Ce qui a certainement été le cas, cette chambre était la chambre d’Eliane lorsque, petite, elle venait chez son oncle et sa tante. Et puis, c’est resté sa chambre. Je me demande si François a aussi une chambre comme cela ici.
Je m’endors très vite malgré toutes les pensées qui m’assaillent. A cinq heures, Tonin frappe à la porte et je me lève. Je casse une croûte rapidos avec lui puis je me casse en direction de Marmande. C’est beau une ville la nuit, paraît-il, et c’est surtout grisant de circuler sans difficulté en voyant émerger les premiers travailleurs du jour.

J’arrive chez moi à sept heures et demie. Flèche me fait une fête comme si j’avais été absent une semaine. Le temps de préparer quelques affaires et je repars, cette fois c’est en direction d’Arcueil. A midi, je fais l’erreur de manger le plat du jour dans un restaurant autoroutier, une andouillette au goût de bran avec des frites décongelées trop cuites et en dessert un vague truc gélatineux aromatisé et édulcoré. Je  reprends la route avec l’estomac au bord des lèvres.
(à suivre...)

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