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jeudi 4 février 2016

Le cabot de Fortunio (83)

L’hôtel étant en face d’un parc, nous faisons une autre promenade avant de rentrer. C’est bien, un hôtel-bar-restaurant, on peut boire un dernier godet avant de se pieuter.
-          Bon, me dit René attablé devant un bloody mary[1] qu’il assaisonne généreusement en tabasco, quelle est la suite du programme ?
-          Bien, réponds-je en levant mon white lady[2] pour trinquer, trinquons d’abord !
-          Cheers !
-          Donc, reprends-je après avoir dégusté une gorgée, la suite des opérations : demain matin, je vais voir Eliane au Val-de-Grâce, je veux avoir de ses nouvelles, il devrait quand même y avoir du neuf, les toubibs ont dû se réunir, faut que je sache quelque chose…
-          D’accord mon pote mais il y a tout de même un truc qui me chipote, c’est de se balader comme ça avec des arquebuses. Pas simple de les laisser dans la bagnole, pas prudent de se balader avec, pas judicieux de les laisser dans une chambre d’hôtel. La meilleure solution serait encore une consigne automatique, il y en a de nouveau dans les grandes gares. Ou alors, si tu connais quelqu’un de confiance…
-          Quelqu’un de confiance à qui tu vas dire je te laisse mon artillerie pendant que je vais à l’hosto, ça se trouve pas comme ça, mon pote !
-          Je sais, mais quelqu’un de confiance à qui tu demandes de garder une valise soigneusement bouclée, ça peut exister, non ?
-          Ici à Paris, je connais personne, absolument personne… attends voir, tout compte fait !, dis-je en me mettant à chantonner : « Mais dans la rue Geoffroy Saint-Hilaire, tirelilonlaire, tirelilonlaire, je n’y connais personne, absolument personne… »
-          Excellente cette white lady mais je crains qu’elle ne te monte à la tête, mon cher Fortunio, dit René en prenant une pose avantageuse.
-          Rien du tout, mon pote La-Science, je viens de me rappeler… je sais pas si j’ai son adresse… attends...
Je fouille dans mon baise-en-ville et j’en sors une carte de visite, la carte que m’avait refilée Estelle, mon étoile filante périgourdine. J’avais passé sous silence notre furtive relation bergeracoise et j’en fais un bref compte-rendu pour que René comprenne de quoi il retourne. Il se dispense de commentaire mais pas d’un subtil ricanement. J’appelle.
-          Je suis bien chez Estelle Guyaume ?
-          Ouiii, à qui ai-je l’honneur ?
-          Je ne sais pas si vous vous souvenez de moi, nous nous sommes rencontrés à Bergerac pour le vernissage de l’exposition de Martine Grebier.
-          Ouiii, il y avait beaucoup de monde ce soir-là…
-          J’ai dû m’éclipser assez rapidement mais vous m’aviez laissé votre carte. Au cas où…
-          Le plombier ! Ne me dis pas que tu es à Paris !
-          Si, justement, enfin, je suis à Gentilly…
-          J’ai essayé toute la journée d’avoir un plombier, mon évier est bouché, viens tout de suite, je t’attends !
-          C’est que… je suis avec un ami…
-          Je m’en fous, je compte sur toi dans moins d’une demi-heure, c’est le ciel qui t’envoie. Tu as mon adresse, c’est au cinquième, le nom c’est pas Guyaume mais Pertelfisse.



[1] 4 cl de vodka, 12 cl de jus de tomates, 0,5 cl de jus de citron, 0,5 cl de Worcestershire sauce, 2 gouttes de tabasco, sel, poivre.
[2] 2 cl de gin, 2 cl de triple sec, 2 cl de jus de citron vert.
(à suivre...)

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