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jeudi 18 février 2016

Le cabot de Fortunio (85)

Il faut reconnaitre que son whisky est fameux. Pendant que nous buvons, le violon continue à jouer. Elle nous explique que son mari fait une carrière internationale et il joue pratiquement tout le temps. Ils voulaient déménager pour aller habiter dans une maison isolée mais, contre toute attente, un collectif de l’immeuble a envoyé une délégation avec une pétition demandant qu’ils y restent car ils voulaient continuer à l’entendre jouer pendant ses séjours à Paris. Donc, ils sont toujours dans cet appartement, ce qui permet à Estelle d’être proche de son boulot à la rédaction du journal. Nous apprenons que son vrai nom est Josette Pertelfisse et qu’Estelle Guyaume est son nom de plume. En fait, elle voulait prendre ce prénom mais elle ne pouvait pas se faire appeler Estelle Pertelfisse. De même, dans ses débuts personne ne la prenait au sérieux jusqu’au jour où elle a pris ce nom de plume et une autre apparence plus que parisienne, extravagante, hyper maquillée avec des fringues excentriques. Avant, elle passait pour un bas bleu, après elle devint la coqueluche de la vie artistique parisienne. De pigiste, elle était devenue chroniqueuse pour les plus grands magazines français et étrangers. Une fois que nous savons tout cela, j’attaque un second whisky et les affaires sérieuses. Je lui explique que j’ai besoin de laisser ma valise chez une personne de confiance car elle contient des documents importants et je ne veux pas risquer de les perdre ou de me les faire voler. Cela la surprend un peu mais ça la flatte aussi que je ne connaisse qu’elle comme personne de confiance dans la capitale. Elle accepte donc et me montre son petit bureau où elle me propose de la déposer. Et elle me donne une clé de son appartement au cas où j’aurais besoin de la récupérer en son absence car il ne faut pas compter sur son mari, il n’ouvre jamais la porte même s’il entend la sonnette. Pour moi, c’est idéal, d’autant plus que René, en parfait gentleman, se propose d’aller chercher la valise dans la voiture, ce qui permet à Estelle de mettre cet interlude à profit pour me faire avaler le baiser de la mort[1]. Après le retour de René, nous terminons nos verres.
-          Messieurs, que toute cette histoire reste entre nous, vous êtes les seuls à connaître la vérité sur Dr Josette et Mrs Estelle. Mais en ce qui vous concerne, monsieur le plombier, je commence à penser que, vous aussi, vous avez des activités parallèles…
-          Si je peux me permettre, nous nous tenons par la barbichette, dis-je en lui tendant ma carte professionnelle.
-          Mmmouais, dit-elle avec une moue équivoque avant de nous faire signe de nous barrer.
Nous prenons l’ascenseur et rejoignons notre japonette dans laquelle nous attend une Flèche toujours patiente.
-          Voilà un personnage qui ne manque pas de piquant, me dit René. Toutefois, j’aurais aimé rencontrer son violoniste de mari.ne serait-ce que pour voir son front au Caucase pareil… au caucuse pareil…
-          Bon, c’était une fois en passant et je pense que je n’ai pas l’exclusivité des faveurs extra-conjugales de Madame Poulit’ Cométo !
-          Tu me fais un poulit’ connaud. J’espère qu’on peut lui faire confiance, à ton météorite sinon on va se trouver un peu démuni si la bise vient.
-          C’est tout ce que j’avais en magasin…
-          Changeons de sujet, je propose de faire un tour vers chez ton Latik avant de se pieuter, histoire de voir, comme ça… pour faire plus discret, tu prends ton clebs en laisse et on se promène comme deux pépés qui font pisser Mirza.
-          On verra pas bézef, tu sais car on ne va pas monter dans le chantier avec le chien, réponds-je.
-          No problème, Mister Fortunio, tu te balades avec Médor et moi je fais un saut vite fait au poste d’observation.
-          Si tu veux, allez on fait comme on a dit, conclus-je.




[1] 2 cl de rhum blanc, 2 cl de whisky, 2 cl de tequila, 2 cl de vodka, 2 cl de chartreuse verte, 2cl de cognac, 1 seul glaçon et 2 toasts à la purée de piment.
(à suivre...)

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