Il faut reconnaitre que son whisky est
fameux. Pendant que nous buvons, le violon continue à jouer. Elle nous explique
que son mari fait une carrière internationale et il joue pratiquement tout le
temps. Ils voulaient déménager pour aller habiter dans une maison isolée mais,
contre toute attente, un collectif de l’immeuble a envoyé une délégation avec
une pétition demandant qu’ils y restent car ils voulaient continuer à
l’entendre jouer pendant ses séjours à Paris. Donc, ils sont toujours dans cet
appartement, ce qui permet à Estelle d’être proche de son boulot à la rédaction
du journal. Nous apprenons que son vrai nom est Josette Pertelfisse et
qu’Estelle Guyaume est son nom de plume. En fait, elle voulait prendre ce
prénom mais elle ne pouvait pas se faire appeler Estelle Pertelfisse. De même,
dans ses débuts personne ne la prenait au sérieux jusqu’au jour où elle a pris
ce nom de plume et une autre apparence plus que parisienne, extravagante, hyper
maquillée avec des fringues excentriques. Avant, elle passait pour un bas bleu, après elle devint la
coqueluche de la vie artistique parisienne. De pigiste, elle était devenue
chroniqueuse pour les plus grands magazines français et étrangers. Une fois que
nous savons tout cela, j’attaque un second whisky et les affaires sérieuses. Je
lui explique que j’ai besoin de laisser ma valise chez une personne de
confiance car elle contient des documents importants et je ne veux pas risquer
de les perdre ou de me les faire voler. Cela la surprend un peu mais ça la
flatte aussi que je ne connaisse qu’elle comme personne de confiance dans la
capitale. Elle accepte donc et me montre son petit bureau où elle me propose de
la déposer. Et elle me donne une clé de son appartement au cas où j’aurais
besoin de la récupérer en son absence car il ne faut pas compter sur son mari,
il n’ouvre jamais la porte même s’il entend la sonnette. Pour moi, c’est idéal,
d’autant plus que René, en parfait gentleman, se propose d’aller chercher la
valise dans la voiture, ce qui permet à Estelle de mettre cet interlude à
profit pour me faire avaler le baiser de la mort[1]. Après
le retour de René, nous terminons nos verres.
-
Messieurs, que toute cette
histoire reste entre nous, vous êtes les seuls à connaître la vérité sur Dr
Josette et Mrs Estelle. Mais en ce qui vous concerne, monsieur le plombier, je
commence à penser que, vous aussi, vous avez des activités parallèles…
-
Si je peux me permettre, nous nous
tenons par la barbichette, dis-je en lui tendant ma carte professionnelle.
-
Mmmouais, dit-elle avec une moue
équivoque avant de nous faire signe de nous barrer.
Nous prenons l’ascenseur et rejoignons notre
japonette dans laquelle nous attend une Flèche toujours patiente.
-
Voilà un personnage qui ne manque
pas de piquant, me dit René. Toutefois, j’aurais aimé rencontrer son violoniste
de mari.ne serait-ce que pour voir son front au Caucase pareil… au caucuse
pareil…
-
Bon, c’était une fois en passant
et je pense que je n’ai pas l’exclusivité des faveurs extra-conjugales de
Madame Poulit’ Cométo !
-
Tu me fais un poulit’ connaud.
J’espère qu’on peut lui faire confiance, à ton météorite sinon on va se trouver
un peu démuni si la bise vient.
-
C’est tout ce que j’avais en
magasin…
-
Changeons de sujet, je propose de
faire un tour vers chez ton Latik avant de se pieuter, histoire de voir, comme
ça… pour faire plus discret, tu prends ton clebs en laisse et on se promène
comme deux pépés qui font pisser Mirza.
-
On verra pas bézef, tu sais car on
ne va pas monter dans le chantier avec le chien, réponds-je.
-
No problème, Mister Fortunio, tu
te balades avec Médor et moi je fais un saut vite fait au poste d’observation.
-
Si tu veux, allez on fait comme on
a dit, conclus-je.
[1]
2 cl de rhum blanc, 2 cl de whisky, 2 cl de tequila, 2 cl de vodka, 2 cl de
chartreuse verte, 2cl de cognac, 1 seul glaçon et 2 toasts à la purée de
piment.
(à suivre...)
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