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dimanche 27 mars 2016

Chroniques de Serres et d’ailleurs. (27)



Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. A force de parler de gouvernement, de députés, d’administration et de potentats locaux, il ne faudrait tout de même pas oublier qu’il y a encore en ce bas-monde des choses qui fonctionnent à l’endroit et des trains qui arrivent à l’heure… enfin, c’est une image, bien sûr ! Et à propos d’arriver à l’heure, s’il est quelque chose qui arrive toujours quand on ne l’attend plus, c’est bien le printemps. Et, avec le printemps, voilà les bourgeons qui gonflent, l’herbe qui verdit et les oiseaux qui chantent. Les premières jonquilles ont déjà montré le bout de leurs pétales, les amandiers et les abricotiers se parent de leur floraison hâtive et moult plantes se pressent du col pour se montrer sous les rayons du soleil. Et s’il est bien une fleur modeste et subtile, c’est celle que l’on appelle depuis la plus haute antiquité « œil-de-soleil », à savoir la tulipe rouge, la petite tulipe rouge de l’agenais.
On remarque au départ sa feuille en forme de lame ou de gouge puis la pointe rouge incarnat se dresse, unique, au bout de sa tige, fermée avec ses pétales joints en calice. Puis, avec la lumière elle s’épanouit et ouvre son écrin en montrant son cœur doré, ocelle qui fait briller le soleil au cœur de la fleur. Les jours passent, doucement la tige s’incline et la fleur mature courbe la tête.
Cette jolie fleur du printemps est connue depuis fort longtemps mais elle est en grand péril de disparaître et c’est une espèce protégée par la loi puisque les pratiques culturales autant que les herbicides la détruisent impitoyablement. Heureusement quelques paysans, des vrais paysans - pas des agriculteurs ou des exploitants agricoles distingués – heureusement disais-je, certains paysans se soucient de protéger les lieux où elle pousse, de conserver en terre les bulbes de ces tulipes et de les défendre contre les ravageurs. Car des prédateurs il en existe, des urbains ou rurbains qui rêvent de cueillir ces petites merveilles des talus pour les afficher sur la table de leur salle à manger et qui tentent de capturer des bulbes pour les planter dans les jardins de leurs lotissements. Mais foin de ces rigolos semi-champêtres ou citadino-ruraux, admirons la floraison de cette petite tulipe sans oublier ses cousines, les charmantes tulipes jaunes que je crois pouvoir appeler tulipes sylvestres. Elles fleurissent à la même époque et sont pareillement protégées par la loi.
Ah, on est loin des glorieux champs de tulipes des Pays-Bas mais rappelons ce que disait Alfred de Musset : « Je hais comme la mort l’état de plagiaire / Mon verre n’est pas grand mais je bois dans mon verre ». Apprécions donc ces discrets et chatoyants ornements de nos talus et clairières, conscients de leur valeur mais sans vain orgueil.
Cette tulipe aurait été importée par les romains il y a au moins deux-mille ans et son nom « fleur-de-soleil » lui a probablement été donné à cause de l’étoile jaune très caractéristique dessinée au cœur de la fleur. Il y a, paraît-il, à Villebramar un verger qui sert de conservatoire à cette plante et je ne vous citerai pas les endroits où elle pousse spontanément. Je sais que les auditeurs de CoolDirect sont respectueux des lois de la nature mais –sait-on jamais ? - il se glisse toujours quelque loup dans la bergerie, quelque renard dans le poulailler et quelque peigne-cul dans une assemblée d’honnêtes gens. Donc, si vous voulez admirer la tulipa agenensis là où elle pousse spontanément, il vous appartiendra de vous promener dans nos campagnes le pied ferme et l’œil aux aguets. Sinon, vous pourrez regarder dimanche prochain sur mon blog, cette chronique y sera illustrée de photos. Et je suis certain que je ne serai pas le seul à publier des photos de notre tulipa agenensis.
Œil de soleil, frêle tulipe, couleur de la passion, cœur doré du désir et volupté de l’éclosion, viens à moi ce printemps encore.

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