-
C’est bien comme ça, me dit René.
Tu essuies soigneusement cet appareil, tu fais de même pour le flingue et on va
balancer tout ça à la flotte. On revient sur la 20, on file sur Paris en
essayant de pas se faire remarquer, à savoir en respectant les limitations de
vitesse, on va récupérer les flingues chez madame Josette, les fringues à
l’hôtel et on repart direction chez Fortunio…
-
Ah non, on avait dit qu’on allait
voir Eliane, coupé-je.
-
On avait dit… on avait dit qu’on
restait ensemble ! Désolé, mon pote mais on traîne pas dans le coin. Un
seul de nous deux ira récupérer nos fringues dans nos chambres. Et en essayant
de la jouer discrète. On a la carte, pas besoin de la rendre et tu vas faire ça
ni vu ni connu, l’air du monsieur qui a besoin de changer de calbute dans la
journée. On s’en fout, tu as payé et en espèces. Donc et ensuite, un tour
rapide pour récupérer la valoche avec les calibres, cette fois tu ne nous joues
pas ton numéro de déboucheur en tous genres et hop, on revient aux pénates et
le plus vite possible. S’il se sait qu’on est dans la région en même temps que
le binz qui vient de se passer, ça pourrait paraître louche. Bon, cela dit,
essaye de jeter un coup d’œil dans la valoche, histoire de voir si notre Edkès
n’a pas trop dépensé en cours de route
Bien sûr, la valise est fermée à clé ?
Nous décidons de surseoir à l’ouverture. Il est près de midi et la circulation
se densifie, René ralentit et se décontracte.
-
Mon pote, je me demande si tu
étais au top aujourd’hui, me dit-il. Sans Flèche et sans moi, je crois que la
matinée aurait été courte…
-
Je me disais aussi, rien de tel
qu’un pote et un chien… Ouais, t’as raison et je ne comprends pas ce qui m’est
arrivé quand j’ai braqué le gonze… comment dire ? Toi, t’aurais pas pu
m’empêcher de le flinguer, cette ordure. Mais cette voix en moi, ouais comment
dire ?...
-
La voix de ta conscience, mon
z’ami !
-
Tu déconnes ! Non, comme si
c’était la voix d’Eliane qui me remontait en moi, c’est vraiment étrange…
-
Quoiqu’il en soit, le résultat est
là, tu l’as pas flingué. On n’est pas des tueurs, nous autres. Tu sais, ou plutôt
tu sais pas, mais à l’armée j’ai fait du tir de précision. Eh ben, je vais te
dire que je me serais jamais vu flinguer une cible vivante. Ou alors il aurait
fallu des circonstances graves, tu vois, mais encore. J’y ai assez réfléchi, à
l’époque, et c’est pour ça que je n’aurais pas supporté que tu flingues ce mec
sans défense. Je ne sais pas s’il va s’en sortir – et je ne le souhaite
franchement pas – mais je suis content qu’il soit allé se planter tout seul et
que tu ne lui aies pas tiré dessus. Bon, on va pas se refaire les dix
commandements. Je suis comme ça et toi aussi. Si t’avais tiré, tu te le serais
intimement reproché tout le temps qu’il te resterait à vivre.
-
Amen.
(à suivre...)
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