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jeudi 14 avril 2016

Le cabot de Fortunio (93)



-          Stratégique mon cul ! Je t’en foutrai, moi, du stratégique. Il a qu’à y aller tout seul, point final.
-          Et si moi j’y allais à ta place ? Ça te dérangerait pas ? T’as pas besoin de moi demain ?
-          Et ben voilà, dis-je. Je prends le volant, tu t’installes confortablement et tu rappelles le dernier numéro sur mon portable. Et tu verras bien !
Nous approchons de Limoges. René sort de l’A20 en direction de Périgueux. Nous changeons de place et je repars. René rappelle Livron. Je préfèrerais ne rien entendre de leur conversation mais toujours est-il qu’ils se mettent d’accord. Livron viendra chercher René demain matin aux petites heures.
-          Recommandation importante, dis-je péremptoirement, tu causes de ce que tu veux mais tu lui parles pas de notre équipée parisienne. Moins il en saura là-dessus, mieux cela vaudra. Cloisonnement et discrétion sont les deux mamelles de la prudence élémentaire, mon cher Watson !
-          Ça, je m’en doute. Parce qu’il est au courant de quoi ? 
-      De tout, dirais-je, mais sauf notre virée à Paris. Il a des correspondants bien placés qui le renseignent mais je tiens maintenant à ce que l’information ne circule que dans un seul sens. Capito ?
-          Jawohl, herr Oberschtroumpfmajor ! Hoch’tête et qu’ça saute !
Périgueux, Bergerac et nous voilà de retour à Marmande. Il est neuf heures, nous nous jetons un rapide casse-croûte arrosé d’un Brulhois pur raisin et chacun au pieu. Je prête mon portable à René pour qu’il se réveille à temps et monte dans ma chambre avec la mallette.
*
Le lendemain matin, je constate que René est parti, je n’ai rien entendu.il m’a laissé le téléphone sur la table. Il faut dire que je me suis endormi dès que je me suis couché, j’étais encore à mille milles de mes chantiers. Et puis, ce matin, c’est comme si tout était rebranché. Je me paie un bon petit déjeuner puis j’ai quand même l’idée de jeter un œil dans la mallette. Bien, le gonze Latik n’a pas jugé utile de changer le code et je peux admirer un beau paquet de billets. Difficile de dire s’il en manque – et, à mon avis, le gonze a pioché dedans – mais il en reste toujours un joli petit tas. Je referme, je planque la mallette dans un recoin de ma fourgonnette et je pars en direction de mes chantiers.
Ce qui est un peu vexant, c’est de constater que mes ouvriers travaillent aussi bien sinon mieux en mon absence. Mais c’est rassurant aussi. Je me fais houspiller par eux car je ne leur ai pas encore filé leur paie. Je passe en vitesse à la banque puis retourne à la maison. A peine arrivé, mon téléphone sonne. C’est François.
-          Fortunio ?
-          Yes, it’s my name, mister Stanley…
-          Toujours aussi spirituel avec tes blagues à deux balles… Ecoute-moi bien car j’ai des nouvelles importantes. D’abord, Eliane a été opérée hier matin et elle est sortie du coma…
-          A quelle heure ? coupé-je.
-         Ben, sur le coup de midi, je dirais. Je ne sais pas, j’étais en avion, je reviens d’Italie, pour affaires quoi et j’ai seulement trouvé l’appel ce matin. Je t’ai appelé de suite, crois-moi…
(à suivre...)

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