Auditrices
et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. La boucle est bouclée, l’anneau de Jeanne
d’Arc a rejoint la France. By Jove, il s’en allait temps et c’est notre joli
vicomte qui a fait sortir le fou du Puy, euh pardon, le Puy du Fou de ses
gonds. Ils sont partis, fiers conquérants, pour Londres et, ayant sorti quelque
trois-cent soixante-seize mille euros de leur bougette, ils ramenèrent l’anneau
de la Pucelle dans les terres vendéennes.
Cet
anneau historique aurait été confisqué – ou plutôt volé – par le fourbe évêque Cauchon,
de sinistre mémoire. Il l’aurait vendu ou donné au cardinal anglais Henry
Beaufort qui, comme nul ne l’ignore, vivait sur une grande échelle. Et, depuis
cette époque, le bijou n’aurait pas quitté l’Angleterre. Notre charmant vicomte
affirme même disposer de la généalogie complète des propriétaires successifs de
l’anneau. Il s’agit d’une archive qui mentionne les « presumed
owners » mais il ne faut pas traduire hâtivement ce mot anglais « presumed » par le
mot français « présumé » qui indique une simple présomption. En
effet, rappelons la rencontre du 10 novembre 1871 entre Stanley et
Livingstone : en pleine brousse, le premier rencontre un blanc aux longues
moustaches et s’adresse au second en ces mots « Dr Livingstone,I
presume ? » et ce dernier lui répond « Yes it’s my name ».
On a tous bien compris que Stanley ne supposait pas mais que cette formule
avait en réalité une fonction phatique telle que d’établir et de prolonger la
communication entre les locuteurs. Et c’était une présomption qui valait preuve
pour ces gentlemen. Il en est donc de même pour les propriétaires de l’anneau
qui, par simple courtoisie, sont qualifiés de presumed owners. Et notre
aguichant vicomte a bien raison de se prévaloir de cette archive, n’en déplaise
aux esprits chafouins qui voudraient douter de l’authenticité de l’anneau de la
demoiselle de Domrémy. De plus, voilà qu’aussi opportunément
qu’involontairement, les anglais volent au secours de l’affriolant vicomte en
réclamant le retour de l’anneau en Albion, ce qui lui donne une plus-value
historique de poids.
Alors,
retournera / retournera pas en Angleterre ? Notre séduisant vicomte se dit
prêt à défendre ce morceau de patrimoine national envers et contre tous, que ce
soit contre le gouvernement anglais, la Royal Navy ou la Commission Européenne.
Voilà enfin un combat à sa mesure car n’oublions pas que ces perfides
outremanchistes nous avaient déjà subtilisé notre général de Gaulle en 1940 et
qu’ils ont mis quatre longues années avant de nous le restituer.
Voilà
bien une histoire, sinon de fous, tout au moins de Puy du Fou et il ne fallait
pas moins qu’une sainte pour la provoquer. Rappelons que Jeanne avait plusieurs
casquettes, comme l’on dit. De bergère, elle était devenue chef de guerre et
ensuite sainte patronne secondaire de la France ; elle ne fut pas
seulement brûlée mais aussi canonisée. De Domrémy à Rouen, en passant par
Vaucouleurs et Orléans où elle fut sacrée pucelle, toute la France s’est
enflammée derrière elle pour bouter l’ennemi hors du pays, libérer Orléans,
libérer Paris et sacrer le roi Charles VII à Reims.
Ne
resterait-il de toute cette épopée que ce seul anneau, il fallait bien que
quelque preux et sémillant guerrier, tel Parsifal dans sa quête du Graal, se
portât à sa recherche et le ramenât sur la terre de la sainte patronne de notre
France républicaine. Entre ici, sabreur gracieux avec ton terrible cortège.
Avec ceux qui font feu de tout bois prêts à monnayer l’histoire comme la
légende, à monter des décors de carton ou de béton pour des touristes assoiffés
de boissons gazeuses et de sandwiches mous. Entre et, dans ton anneau, mets-y
un prunus !
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