Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. A
l’époque des budgets municipaux, moult édiles fourbissent leurs armes afin de
réclamer de l’argent pour leurs communes. On voit fleurir des articles dans les
quotidiens, des sénateurs sortent de leur torpeur palato-luxembourgeoise pour
se porter au secours de ces maires en colère ou en détresse. D’aucuns même,
oublieux de leur passé, reprochent au gouvernement des méfaits dont ils ne sont
eux-mêmes pas totalement innocents. Certains sont aussi du genre à manger avec
les loups le matin et à pleurer avec le berger l’après-midi, laissant passer au
Parlement des lois contre lesquelles, une fois de retour dans leurs
circonscriptions, ils font mine de se révolter avec une fureur de bon aloi.
Disons que les sénateurs sont élus par ce que l’on appelle « grands
électeurs » et qu’ils ont donc besoin de soigner leur électorat.
De plus, s’il paraît que certaines communes ont
du mal à boucler leur budget, il faut reconnaître qu’un bon nombre d’autres
peuvent se permettre des dépenses fastueuses et des investissements inutiles ou
redondants et de toute façon à fonds perdus. Bien sûr, l’argent dépensé n’est
jamais perdu pour tout le monde : on nous dit bien que les investissements
publics soutiennent l’emploi dans les entreprises du bâtiment et des travaux
publics mais cela profite généralement aux mêmes entreprises qui vivent sous
perfusion avec cet argent des collectivités publiques et leurs patrons roulent
dans de grosses berlines ou de rutilants 4 x 4 flambants neufs.
Alors, qu’en penser ? Car, d’après le voisin
de mon épicier, si les collectivités locales étaient des entreprises ou des
commerces privés il y a longtemps qu’elles auraient déposé le bilan. Mais
heureusement pour elles, elles ont des mécènes toujours prêts à les soutenir et
ces bienfaisants financeurs, ce sont les contribuables. Car le contribuable est
un banquier qui a toujours les moyens de couvrir les dépenses de ses élus, il
le fait avec plaisir et dévouement et il est bien le premier à plaindre ses
élus locaux dans la débine lorsqu’ils crient misère : un p’tit coup de CSG
par ici et un p’tit coup de TVA par-là, à la vôtre et on est contents de
trinquer dans tous les sens du terme.
Il est remarquable de voir que ce contribuable
est aussi un électeur et qu’il s’obstine autant à payer de l’impôt qu’à élire
la même classe politique élection après élection. Force est de reconnaître
qu’une telle constance à enrichir des élus et leurs affidés est admirable et
c’est à cela que l’on comprend que l’électeur se satisfait de regarder
passivement les grandes chaînes de télévision nationale où ses élus viennent
faire le spectacle. Et il ne manque pas d’acteurs sur cette scène avec plus de
36 000 maires et autant sinon plus d’élus intercommunaux, tous ces élus
émargeant au généreux budget de l’Etat, retraites et médailles comprises.
Fort heureusement si ces élus sont nombreux, les
électeurs-financeurs le sont plus encore, ce qui permet de continuer à les
ponctionner de manière plus ou moins douloureuse. Sur ce sujet, on en est
encore à l’époque des médicastres de Molière pour lesquels la saignée et la
purge étaient les meilleures médications.
On voit par-là que le remède peut parfois être
pire que le mal.
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