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dimanche 9 décembre 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs IV (13)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Il me paraît difficile de ne pas aborder le sujet d’actualité brûlante qui agite non seulement le monde médiatico-politique mais aussi nos merveilleux giratoires, à savoir le mouvement des gilets jaunes. Sincèrement, je dois dire que je n’ai rien vu venir et je pensais que l’action du 17 novembre ne serait qu’un feu de paille bien vite éteint. C’était faire peu de cas du ras-le-bol généré par l’aveuglement de nos dirigeants et par l’arrogance de ces élus de fraîche date qui ont cru que la partie était gagnée et qu’ils allaient pouvoir tranquillement se partager le gâteau. Je m’étais donc bien trompé et mon erreur est d’autant plus regrettable que je fais partie moi-même de ceux que le gouvernement et ses affidés ont décidé de pressurer.
L’idée de brandir le gilet jaune est bien astucieuse car bon nombre d’automobilistes en possèdent au moins un puisqu’il nous a été imposé par quelque gouvernement précédent. Donc, ni dépense supplémentaire ni difficulté d’approvisionnement. Mais je me suis toujours plu à brocarder les scribes, les chefs, les sous-chefs et les entrechefs tous fluogiletés qui, d’un air important, officient sur nos routes en brandissant leurs bombes fluotantes elles aussi, et me voilà bien gêné devant cette profusion de jaquettes réfléchissantes. Car ces gilets sont une arme pacifique que les manifestants retournent vers ceux qui les contraignent à la posséder.
Donc, c’est un peu l’affolement dans la cage à bourdon de l’Elysée et de Matignon sans pour autant que ces messieurs se départissent de leur morgue habituelle, portant des accusations hasardeuses et noircissant le tableau. Bien sûr, ce n’est pas facile de devoir affronter une population qui n’est pas canalisée par ce que l’on appelle les corps intermédiaires, que ce soient les partis ou les syndicats. Les manifestations du style grand-messe suivie de procession ne sont plus de mise et il faut reconnaître que notre nouveau personnel politique manque singulièrement d’expérience et surtout de connaissance du terrain. Fort à propos, au plus haut niveau de l’Etat, on s’est dépêché de fournir, tant aux ministres qu’aux députés, des EDL, en clair des éléments de langage, qui leur permettront de tenir le discours formaté agréé par la présidence. Et c’est bien à cela que l’on voit que l’enmarchisme est une sorte de grand bricolage de la politique où l’on plâtre un peu d’écologie avec des bouts de transition. Le président qui se disait ni de droite ni de gauche, n’était ni Carrefour ni Leclerc mais il est en quelque sorte le super discount de la politique, une sorte de Lidl mâtiné de bazar oriental.
Et pendant ce temps-là, malgré la pluie ou le froid, les gilets jaunes continuent, montent sur Paris et font déjanter les préfectures. Mais leur force est aussi leur talon d’Achille : sans chefs, ils sont aussi sans idées fortes, sans organisation ils risquent de s’étioler. Car il faut bien être conscients que, même avec un autre gouvernement, la haute fonction publique sera toujours là et c’est bien elle qui prépare les dossiers en laissant aux élus une étroite marge de manœuvre. Et même avec un autre gouvernement, les lobbies seront toujours les mêmes, l’émanation des puissances d’argent qui leur bouffent ce qu’il leur reste de marge de manœuvre. En fait, il ne reste plus guère au président que la joie de parader avec des chefs d’Etats étrangers et de commémorer çà et là. Et il ne reste aux élus que le plaisir de couper des rubans et de mâchouiller des petits fours. Mais en jouissant des prébendes et des retraites dorées y afférentes.
 On voit par-là qu’au diable le grand bazar mondial du président, vive le marché de proximité.

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