Auditrices et auditeurs qui m’écoutez,
bonjour. Il me paraît difficile de ne pas aborder le sujet d’actualité brûlante
qui agite non seulement le monde médiatico-politique mais aussi nos merveilleux
giratoires, à savoir le mouvement des gilets jaunes. Sincèrement, je dois dire
que je n’ai rien vu venir et je pensais que l’action du 17 novembre ne serait
qu’un feu de paille bien vite éteint. C’était faire peu de cas du ras-le-bol
généré par l’aveuglement de nos dirigeants et par l’arrogance de ces élus de
fraîche date qui ont cru que la partie était gagnée et qu’ils allaient pouvoir
tranquillement se partager le gâteau. Je m’étais donc bien trompé et mon erreur
est d’autant plus regrettable que je fais partie moi-même de ceux que le
gouvernement et ses affidés ont décidé de pressurer.
L’idée de brandir le gilet jaune est bien
astucieuse car bon nombre d’automobilistes en possèdent au moins un puisqu’il
nous a été imposé par quelque gouvernement précédent. Donc, ni dépense
supplémentaire ni difficulté d’approvisionnement. Mais je me suis toujours plu
à brocarder les scribes, les chefs, les sous-chefs et les entrechefs tous
fluogiletés qui, d’un air important, officient sur nos routes en brandissant
leurs bombes fluotantes elles aussi, et me voilà bien gêné devant cette
profusion de jaquettes réfléchissantes. Car ces gilets sont une arme pacifique
que les manifestants retournent vers ceux qui les contraignent à la posséder.
Donc, c’est un peu l’affolement dans la
cage à bourdon de l’Elysée et de Matignon sans pour autant que ces messieurs se
départissent de leur morgue habituelle, portant des accusations hasardeuses et
noircissant le tableau. Bien sûr, ce n’est pas facile de devoir affronter une
population qui n’est pas canalisée par ce que l’on appelle les corps
intermédiaires, que ce soient les partis ou les syndicats. Les
manifestations du style grand-messe suivie de procession ne sont plus de
mise et il faut reconnaître que notre nouveau personnel politique manque
singulièrement d’expérience et surtout de connaissance du terrain. Fort à
propos, au plus haut niveau de l’Etat, on s’est dépêché de fournir, tant aux
ministres qu’aux députés, des EDL, en clair des éléments de langage, qui leur
permettront de tenir le discours formaté agréé par la présidence. Et c’est bien
à cela que l’on voit que l’enmarchisme est une sorte de grand bricolage de la
politique où l’on plâtre un peu d’écologie avec des bouts de transition. Le
président qui se disait ni de droite ni de gauche, n’était ni Carrefour ni
Leclerc mais il est en quelque sorte le super discount de la politique, une
sorte de Lidl mâtiné de bazar oriental.
Et pendant ce temps-là, malgré la pluie ou
le froid, les gilets jaunes continuent, montent sur Paris et font déjanter les
préfectures. Mais leur force est aussi leur talon d’Achille : sans chefs,
ils sont aussi sans idées fortes, sans organisation ils risquent de s’étioler.
Car il faut bien être conscients que, même avec un autre gouvernement, la haute
fonction publique sera toujours là et c’est bien elle qui prépare les dossiers
en laissant aux élus une étroite marge de manœuvre. Et même avec un autre
gouvernement, les lobbies seront toujours les mêmes, l’émanation des puissances
d’argent qui leur bouffent ce qu’il leur reste de marge de manœuvre. En fait,
il ne reste plus guère au président que la joie de parader avec des chefs
d’Etats étrangers et de commémorer çà et là. Et il ne reste aux élus que le
plaisir de couper des rubans et de mâchouiller des petits fours. Mais en
jouissant des prébendes et des retraites dorées y afférentes.
On
voit par-là qu’au diable le grand bazar mondial du président, vive le marché de
proximité.
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