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dimanche 8 décembre 2019

Chronique de Serres et d’ailleurs V (14)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Une fois n’étant pas coutume, je citerai aujourd’hui une lettre ouverte signée par un certain nombre de paysans dont moi-même.      Halte à la dénonciation d'un pseudo-agribashing ! Oui à une agriculture de vie et d'alliance avec les citoyens !
Nous, agriculteurs, agricultrices, observons une atmosphère de crispation, d’incompréhension, entre une partie du monde agricole et le reste de la société, principalement focalisée sur l’utilisation des pesticides et sur l’élevage industriel. Concernant les pesticides, leurs effets néfastes pour la santé humaine et l'environnement sont prouvés par de nombreuses publications scientifiques, tandis que le rejet de l'élevage industriel correspond à la dénonciation d'un système de maltraitance animale à grande échelle qui ne permet pas aux éleveurs et salariés concernés de s'épanouir ni de s'en sortir économiquement. Ces pratiques portent atteinte à l'environnement ici et ailleurs comme le montrent le problème des algues vertes en Bretagne, la dégradation de nos ressources en eau, ou encore la déforestation générée par la monoculture de soja OGM au Brésil. Les critiques de ces pratiques, légitimes, sont qualifiées d'agribashing par la FNSEA, formule reprise par le ministre de l'agriculture et le président de la république. Pourtant la remise en cause du modèle agricole dominant n'est pas de l'agribashing ! Il ne s'agit pas de dire que l'agriculture est mauvaise, maléfique, ou que les urbains n'aiment pas les agriculteurs ! Il s'agit de critiquer un modèle agro-industriel qui entraîne les agriculteurs et notre société dans le mur. Ce modèle endette dangereusement les agriculteurs, continue de vider les campagnes de leurs paysans, pousse à un gigantisme empêchant les jeunes de reprendre les fermes des retraités, pollue les sols et les eaux, détruit la biodiversité. Cette agriculture basée sur l’agro-chimie, la spécialisation à outrance des territoires et la mondialisation, contribue au réchauffement climatique et est peu résiliente face aux événements extrêmes qui se multiplient. Pourtant, l'agroécologie paysanne, bio que nous pratiquons depuis de nombreuses années représente une alternative crédible. Cette agriculture, qui lie agronomie et écologie, nous permet de vivre avec dignité et de transmettre nos fermes, tout en fournissant une alimentation saine à nos concitoyens. Nous montrons au quotidien que ce type d’agriculture peut redynamiser les territoires, en créant des emplois, du lien social, du paysage, de la biodiversité et de la résilience. De plus en plus de paysans optent pour cette agriculture du futur, et nombreux sont ceux qui souhaitent engager une transition que les politiques publiques, du local jusqu'au niveau européen, avec la PAC, devraient beaucoup mieux accompagner, car les moyens financiers existent.
Nous, paysannes et paysans, actifs ou à la retraite, ne partageons pas la dénonciation d'un pseudo-agribashing, opérée par certains acteurs à la solde de l’agro-industrie bloquant la transition agro-écologique, détournant l’attention des vraies questions au risque de creuser le fossé entre agriculteurs et citoyens et d'attiser la violence. Nous affirmons qu’il est urgent de changer de modèle agricole, de développer une politique alimentaire favorisant les productions locales et biologiques, et d’abandonner l’utilisation des pesticides et  l’élevage industriel.
Certains signataires sont des responsables professionnels, syndicaux, voire politiques mais c'est avant tout en qualité d'agriculteurs, paysans, qu'ils s'adressent ici à leur collègues et à la société.

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