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jeudi 20 février 2020

Appelez-moi Fortunio (54)


-          Maintenant, il faudrait parler un peu de la maison. J’aimerais bien aller voir la gloriette mais ce n’est pas possible sans se faire voir. Alors, une cave, un rez-de-chaussée, un étage et un grenier. Avec, de chaque côté, une tourelle dont au moins une en guise de pigeonnier. Commençons par la cave, qu’est-ce que tu peux me raconter ?
-          Ça commence mal, si je peux dire ! Pour revenir, vite dit, à la gloriette, il n’y a rien d’intéressant, c’est là que les trous-du-cul avaient largué mon père pendant plusieurs mois. Je n’y suis même pas encore allé depuis ma première sortie. Quand j’étais plus jeune, c’était là que je planquais mes petits trafics mais, bon, ça a mal fini avec cette histoire de tableau. Je me suis fait cent sacs vite fait, vite bouffés et vite alpagué. Passons et changeons de sujet ! Donc, tu parles de la cave. Je n’y suis jamais descendu…
-          Tu as tort, il y a une belle réserve de pinard et un beau paquet de conserves…
-          Pfoui, tu sais, moi, les conserves, je préfère le surgelé, tu as vu ma réserve ! Mon père ne voulait pas que j’aille dans cette cave, il disait que c’était un mauvais endroit, c’est vrai que c’est là qu’on a trouvé les prisonniers, un mort-mort et un mort-vivant. Et c’est là que les miliciens torturaient leurs prisonniers…
-          Ils ne les livraient pas à la Gestapo ?
-          Tu parles, c’étaient des enlèvements crapuleux, soit ils rançonnaient, soit ils cherchaient à faire dire à leurs prisonniers où se trouvait leur argent ou leurs valeurs. Enfin, c’est ce qu’on m’a raconté. Mon père ne voulait pas en parler parce qu’il avait vu suffisamment de règlements de comptes par très jojos au moment de la libération. Quand il a acheté, d’une part il n’était pas au courant de ce qu’il s’était passé ici et d’autre part il n’a pas occupé le château pendant plusieurs années, tout occupé qu’il était par son entreprise du bâtiment et par son activité de transport qu’il avait créé. Mais au fil des années, il a fini par apprendre l’essentiel de l’histoire. Mais il a toujours pensé que moins on en parlerait, moins cela porterait tort à la valeur de la maison.
-          Mais alors, qui t’a parlé de tout cela ?
-          Un habitant du village qui avait été juge de paix après la guerre et qui connaissait bien des tenants et aboutissants de l’histoire locale. Il vit toujours, tu peux aller le voir si cela te passionne…
-          Pas question pour le moment, j’ai besoin d’avancer à l’aide de ce que tu me diras car nous sommes, en quelque sorte, partis pour un huis-clos. Puisque tu n’as rien à me dire sur cette cave, parle-moi du grenier maintenant.
-          Juste pour terminer, je sais que le gardien, après la libération, s’est chargé de nettoyer la cave et c’est lui qui a mis tout l’attirail de torture des miliciens dans la caisse…
-          Dont tu me feras le plaisir de te débarrasser au plus vite…
-          J’ai bien compris, j’ai bien compris ! Tu veux que je te parle du grenier ? Ben, c’est à peu de choses près comme pour la cave sauf que j’y suis allé deux ou trois fois, lorsque je fouinais pour savoir ce que je pourrais trouver à vendre pour me faire un peu de fric. Bon, c’est un bric à brac plein de poussière et de toiles d’araignées… j’aime pas les araignées !
-          Il y en a bien qui prétendaient que tu en avais une au plafond !
-          C’est vrai, mais je n’aimais pas les araignées déjà tout gosse, une prémonition sans doute…
-          Et l’étage alors ? Rien à signaler ?
-          Que veux-tu que je te dise, c’est des chambres à coucher, mon père a fait installer trois salles d’eau, WC, le chauffage central…
-          Ah ! Et où est la chaudière ?
(à suivre...)

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