IV.
La nuit de la Saint-Jean
Quand il parlait de faire
une entrée triomphale à Soméjac, René ne croyait pas si bien dire. Non
seulement on est dimanche matin mais encore il y a fête au village Autant dire
que ces deux gonziers déferlant dans la grand-rue ne passent pas inaperçus. Enivré
par son triomphe, René y va de quelques zigzags qui mettent en joie la
population locale. Les villageois reconnaissent la mobylette de Daniel et comme
ils semblent intrigués, Albert salue quelques personnes, après l’arrêt du
moteur.
-
Mesdames, messieurs, bonjour, dit-il. Il y
a bien de l’animation chez vous et cela sent bien bon !
-
Oh, c’est qu’on prépare le méchoui pour ce
soir, dit un personnage rubicond. Mais, dites-moi, monsieur, on dirait la
mobylette à Dany Rambaud…
-
Très juste, cher monsieur, répond René, et
voilà t’y pas qu’il m’a embauché comme pilote d’essai. Je fais donc une
tentative de record du monde avec mon ange gardien sur le porte-bagage.
-
Eh bé, il lui manquait plus que ça, à Dany.
Il va venir à la fête du village, alors ?
-
Non pas, monsieur, il est absent et ne
reviendra que demain. Nous étions chargés de libérer le château avant son
installation définitive, répond Albert, nous sommes l’entreprise Ghostbuster,
décapages en tous genres.
-
Gobusteur, c’est quoi comme nom, ça ?
C’est pas bien français…
-
En effet, je viens de Marmande, je suis né
dans une serre entre deux tomates…
-
Oh, je vois que vous aimez vous amuser,
vous autres ! Vous venez à la fête, alors ? Ce midi, apéritif offert
par la municipalité puis, pour ceux qui veulent, petit repas poule au pot. Cet
après-midi, concours de pétanque, jeux divers, casse-bouteilles et autres. Ce
soir, méchoui avec avant hors d’œuvres, entrée, fayots, salade, fromage et
dessert. Café, Armagnac ou gnôle puis bal champêtre ! Vous n’allez pas
rater ça, tout de même ? Douze francs à midi, vin et café compris, trente
francs le soir, musique et pince-fesses gratuits ! A vot’bon cœur !
-
Alors, voilà qui est vraiment tentant,
déclare René. Mais, nous avons à faire avant, je cherche une pompe avec du
deux-temps, je vais trouver ça ici ?
-
Allez voir à la quincaillerie et si
jamais, on peut demander à Jeannot, il trimballe toujours sa tronçonneuse dans
sa 2 CV, il vous dépannerait…
-
Merci monsieur pour tous ces
renseignements. Alors, mon bon Fortunio, on s’inscrit pour le repas ?
-
Oh oui, même et –pourquoi pas ?- pour
midi et pour le soir, on va pas se refuser un petit bal, non ? On peut
s’inscrire où, monsieur ?
-
Eh bé, ici, c’est moi le président du
comité des fêtes ! Donc deux fois deux repas ?
-
Oui, oui, répond Albert. Je vous paie
maintenant ?
-
Oh, monsieur, vous savez ce qu’on dit
qu’on a toujours tout le temps pour payer et pour mourir ! C’est pas la
ville, ici, on fait confiance. Mais c’est noté !
-
D’accord, on fait le plein, on fait un
saut à Meauzié et on revient se jeter un Pastis derrière la cravate, dit René
en pédalant pour démarrer.
-
Adissiatz, les jeunes, crie le rougeaud.
Nos deux motards
redémarrent sur la grand-rue, direction la quincaillerie où ils trouvent de
quoi abreuver leur bourrin. Puis ils partent en direction de Meauzié, cela à
l’époustouflante vitesse de 20 km/heures en descente avec le vent dans le dos.
(à suivre...)
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