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jeudi 9 juillet 2020

Appelez-moi Fortunio (74)


Albert sent que le bonhomme en a un peu sur la patate et qu’il aimerait que quelqu’un écoute ce qu’il a à raconter.
-          C’est bien dommage, je crois que c’est toujours intéressant de connaitre l’histoire, même la petite histoire, des vieilles demeures, dit-il.
-          Ah monsieur, vous ne croyez pas si bien dire ! Voyez, moi, je m’intéresse à l’histoire et je pourrais vous en raconter sur la région, les châteaux, les villages, les maisons. Je vais vous dire, je suis facteur, enfin maintenant retraité. Mais quand on circule dans la campagne, on en voit des choses, bien plus que d’autres. Et on entend parler les gens, il m’est arrivé de parler avec des anciens et, comme je ne pouvais pas retarder trop ma tournée, de revenir en fin d’après-midi ou le dimanche. Et j’en ai entendu des choses, pas toujours intéressantes mais il faut ouvrir des centaines d’huitres pour trouver une perle, dit-on. Mais bon, ça vous intéresse ?
-          Ah, j’aimerais bien vous entendre parler du château et de ce monsieur Sammy…
-          Dites-moi, vous êtes venu ici pour le repas de midi, la poule au pot ?
-          Oui, nous avons retenu en effet.
-          Vous n’êtes pas seul, vous êtes avec votre dame ?
-          Non non, répond Albert en riant, je suis avec un collègue…
-          Parce que, enfin si ça vous dit, on pourrait se mettre à la même table. Moi je suis avec mon épouse. Votre collègue pourrait se joindre à nous.
-          Oh, mon collègue a retrouvé des amis à lui, il voudra surement être avec eux. Mais moi, je viendrais volontiers à la même table que vous.
-          Alors, écoutez-moi. Maintenant, c’est l’apéritif, on ne va pas rater ça. Ma femme va arriver et on va déjà aller réserver des places. Vous verrez après votre collègue, il vous dira ce qu’il veut faire.
Ils s’approchent des tables et inclinent trois chaises pour les réserver. En s’approchant de l’apéritif, ils croisent René avec un de ses amis et ils conviennent de se mettre eux aussi à la même table.
-          Je vous préviens tout de suite, dit l’homme, ici l’apéritif se mérite, il faut d’abord écouter le discours du maire et ce n’est pas rien. Il parle bien mais il faudrait arriver à le débrancher, il a toujours du mal à conclure et il en rajoute toujours en fin de parcours. C’est pour cela que le président du comité des fêtes lui passe tout de suite la parole. Et encore, le pire c’est quand il y a le conseiller général. Celui-là, il ne suffirait pas de le débrancher, il faudrait l’abattre à la carabine si on voulait l’arrêter. Bon silence, voilà notre officiel !
Effectivement, ils apprennent tout ce qui s’est passé dans la commune depuis au moins un an sinon plus et tout ce qui se passera dans les cinq années à venir, avec exposé des motifs, nombreux alinéas, considérations climatiques et généalogiques. Puis, lorsqu’ils croient que la conclusion va entraîner la fin, le maire a oublié un paragraphe, ce qui leur vaut une conclusion additionnelle. Enfin, ils peuvent s’approcher des cacahuètes grillées et des bouteilles, les ayant bien méritées. Tout de suite, l’ambiance monte pendant que les bouteilles descendent.
(à suivre...)

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