– Voilà, et ses mœurs lui valaient des difficultés, des brimades. Même de la part de son père, le pauvre, paix à ses cendres ! Raymond a donc décidé de faire du droit pour faire pièce à ceux qui lui voulaient du mal. Et il ne s’est pas mal défendu, le bougre, si j’ose dire. Même son père, qui le prenait pour un bon à rien, a dû reconnaître que son fils savait se faire respecter. De plus, Raymond, lorsqu’il a quitté le barreau et qu’il a monté son magasin, n’a pas demandé un sou à son père pour démarrer son commerce. Il gagnait sa vie et si ses mœurs chagrinaient son père, il a fini par en prendre son parti. C’est un sacré gaillard ce Raymond, j’aurais aimé avoir un fils comme lui, toujours si attentionné et courtois.
– Donc, je pense avoir suivi votre raisonnement, dit Hervé qui ne veut pas se laisser entrainer vers des considérations qui pourraient se révéler difficiles. En classant l’affaire de la jeune fille, les gendarmes ont considéré que Leyden était bien le coupable et ils n’ont pas cherché plus loin. Mais avaient-ils d’autres pistes ?
– C’est bien ce qui s’est murmuré aussi à l’époque, mais faute de témoins, Artur Leyden a officiellement eu un accident et la petite…, je ne sais plus son nom, est morte de noyade accidentelle, elle aussi.
– Pour Leyden, il n’y avait aucun témoin, mais pour la jeune fille ?
– Il y avait le témoignage des parents, ils ont dit, si je me souviens bien, que la gamine était sortie la nuit et était tombée dans la mare.
– Il n’y avait donc que les parents ?
– Oui, je pense, c’étaient de tout petits fermiers, ils n’avaient certainement pas de domesticité.
Hervé sent que la tante Laure n’en sait pas plus et il ne veut pas insister. Il a tout de même un soupçon : Raymond ne lui a peut-être pas tout dit sur cette affaire.
Il prend congé de l’aimable dame et, comme il est près de six heures, il revient chez lui.
*
Maintenant, il considère qu’il prend l’affaire en mains. Il y a quelques années, il aurait tout envoyé balader, mais aujourd’hui il peut se permettre de jouer les enquêteurs. Et tout d’abord, pas question d’en faire une obsession. Demain, il fera jour. Et demain, pas d’affaire Leyden. Il prend son téléphone et appelle Sara pour lui demander s’il peut venir visiter son atelier dans l’après-midi. Elle accepte volontiers, sous condition qu’il n’arrive pas trop tôt et qu’après qu’elle lui aura présenté ses œuvres, ils aillent diner ensemble où bon leur semblera. Ces conditions ne paraissant guère exorbitantes, il accepte volontiers la proposition et constate qu’il s’en réjouit intérieurement.
*
(à suivre...)
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