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dimanche 1 juillet 2012


Chronique du temps exigu (7)

J’ai fait un rêve absurde… je vivais dans une ville, une ville agréable avec de grandes et belles avenues, de vastes places agrémentées de parcs, de jolies rues avec des maisons pimpantes, des venelles typiques et des passages mystérieux. Puis, autour de la ville, il y avait des faubourgs et des banlieues laborieuses qui donnaient sur une campagne riante avec des chemins de traverse.
Cette ville avec son arrière-pays, c’était ma langue française, la nôtre, avec sa grande syntaxe, sa grammaire touffue, ses mots pittoresques et son orthographe complexe. Puis, dans les alentours, le jargon de nos métiers et l’argot populaire. Enfin, les patois des pays et, plus loin encore, les travers bénins de notre parler quotidien. J’étais dans la patrie d’Albert Camus, notre langue française.
Et, toujours dans le même rêve, je vis alors arriver le cauchemar. Je vis venir la langue de la toile, cette langue tapée sur des claviers borgnes et sans âme. Je me voyais parcourir les mêmes avenues défoncées d’une syntaxe fracassée,  dans de vastes places remplies d’immondices de la grammaire oubliée, dans des rues aux façades douteuses de mots incompris et dans des passages souillés des déchets d’une orthographe perdue. Autour de la ville nulle ordure n’était plus ramassée et un sabir douteux souillait le pavé luisant de graisse. Des hordes barbares avaient-elles soudain envahi ma patrie ?
Non, les barbares étaient de notre race, se croyaient de notre patrie et de notre langue…Je me sentais devenu un étranger dans ma patrie.
Vous voyez bien, c’était vraiment un rêve absurde.

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