En vedette !

dimanche 12 juillet 2015

Chronique du temps exigu (157)

Avec les rêves de Monsieur Schulze, l’Allemagne serait-elle en train de connaître le retour du refoulé ?
Ce dernier aurait souhaité une démission du premier ministre grec élu : la social-démocratie a du souci à se faire… Avant lui, le journal Die Welt avait déjà tenté de refaire l’histoire à sa façon en accusant « La Grèce » d’avoir déjà détruit une fois l’ordre européen… en 1830 ! On peut se demander si ce journal reproche à « La Grèce » de ne pas avoir su ébranler l’ordre européen aussi efficacement que « L’Allemagne » a pu le faire à plusieurs reprises depuis cette époque. Quand on refait l’histoire, il faut savoir le faire. Et quand on accuse « La Grèce », il faut parfois penser à ce que ce nom a de pluriel et réfléchir au fait qu’il représente infiniment de singuliers. Mais quand on rêve d’un gouvernement de technocrates, pense-t-on encore aux individus que l’on est prêt à écraser sous sa botte ? Quand on veut assécher le marais, on ne se soucie pas des grenouilles.
L’Europe des financiers, des rentiers et des cumulards n’est plus l’Europe des peuples mais elle est la chambre d’enregistrement des diktats des lobbies financiers, commerciaux et industriels. Elle dégrade l’environnement en faisant semblant de le protéger : en effet, elle protège l’environnement des riches au mépris des pauvres. Elle fait disparaître les agricultures locales au profit de productions agro-industrielles qui dévaluent les terrains et les savoir-faire et qui donnent le monopole aux magnats des semences et des phytosanitaires.  Mais elle protège avec soin les boursicoteurs qui ont spéculé sur les dettes nationales. De nos jours, avec le pouvoir financier, on peut jouer à gagner à tous les coups : l’Europe couvre les risques des agioteurs et leur laisse les gains : c’est le jeu à qui gagne, gagne.
Cette Europe de financiers, de créanciers, de rentiers n’est plus notre Europe… l’a-t-elle jamais été ? Elle est gérée par des commissaires sans légitimité populaire, par des élus arrivistes, cumulards et pré-pantouflards et par des fonctionnaires aux prérogatives exorbitantes. Et c’est cette Europe de riches qui veut nous faire la leçon ? C’est cette Europe qui, sournoisement, réintroduit le totalitarisme le plus implacable : celui de l’argent. Même si Syriza échoue dans son entreprise, elle aura obligé l’Europe à montrer sa face brune.
Quand Sophocle fait dire par Créon à Antigone : « Tu es la seule parmi les Cadméens à penser ainsi », elle répond : « Ils pensent comme moi mais se mordent les lèvres pour te complaire »  (ὁρῶσι χοὖτοι, σοὶ δ᾽ ὑπίλλουσιν στόμα.)

On voit par-là que nous sommes trop nombreux à nous mordre les lèvres.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire