Lectrices et lecteurs, bonjour. L’Ecole Nationale d’Administration, dite ENA, vient de fêter ses
soixante-dix ans d’existence. En effet, l’ENA a été créée en 1945 non par
Charlemagne mais par une ordonnance concoctée par Michel Debré. Cette
institution était investie de deux missions : la professionnalisation de
la haute fonction publique et sa démocratisation. S’il semble que la première
de ces missions lui convienne bien, il parait toutefois que la seconde passe
régulièrement à l’as. Mais où irions-nous si les pauvres devenaient énarques ?
Je vous le demande.
A cette occasion, le journal « Le
Figaro » du 9 octobre publie un article sur le sujet et donne aussi la
parole à la présidente de l’ENA. Cette diplomate rappelle donc les deux
missions citées ci-dessus en reconnaissant que la mission de diversification n’est guère remplie.
Notons bien qu’en bon énarque, elle n’utilise pas le mot démocratisation mais
le mot diversification qui est bien plus poétique. Néanmoins, si elle reconnait
donc ce manque, elle promet de faire mieux à l’avenir. Voilà qui est rassurant.
Interrogée sur la formation dispensée par cette grande école, elle déclare qu’elle
trouve ceux qui disent « je n’ai rien appris à l’ENA » plutôt
arrogants. Voilà aussi qui est intéressant car, si je comprends bien, les
énarques arrogants sont donc ceux qui n’ont rien appris et rien compris. Mais
alors, qui sont les autres ?
Cela dit, le gouvernement vient de valider
une nouvelle réforme de la scolarité qui sera mise en œuvre en janvier 2016. Et
il vaut certainement mieux une nouvelle réforme qu’une ancienne réforme, cela
permet à coup sûr de faire du neuf avec du neuf, à moins que cela ne soit l’inverse.
Cette réforme nouvelle donne une
importance accrue au numérique, au management public, à la relation entre la
fonction publique et le citoyen et insiste sur l’éthique et la déontologie.
Voilà qui n’est pas de la réformette mais le meilleur est pour la fin, à savoir
que l’on consacrera du temps pour que les apprentis énarques connaissent la
réalité du terrain : ce n’est plus une réforme, sire, ce sera une révolution !
La dernière question du journaliste porte
sur l’image de l’école qu’il dit être dégradée dans l’opinion publique. La
réponse de la présidente vaut son pesant de cacahuètes et je vous la livre
telle que j’ai pu la lire dans le journal : « Lors de périodes
difficiles, on cherche toujours des boucs émissaires et l’ENA en est un. Cette
mauvaise image se transmet également par certains tics de langage chez les
politiques ou les journalistes. C’est un réflexe populiste ou démagogique. »
Allons donc, je pensais qu’une image, bonne ou mauvaise, dépendait avant tout
de ce que je donne à voir mais de nos jours, il est si simple de parler de
populisme et de démagogie, surtout lorsqu’on leur préfère l’élitisme et l’oligarchie.
Il est si simple de se faire passer pour une victime et il est si simple de
dire « c’est pas moi c’est l’autre ». Mais ça, c’est un réflexe de
cour de récréation, bien peu digne d’une grande école. Mais ces hauts
fonctionnaires ert ces élites pensantes et dépensantes supportent mal la
critique qui, venant d’en bas, vient donc du peuple, populus et démos sont les racines de ces mots. Allons, allons,
madame la présidente, sachez que « sans la liberté de blâmer, il n’est
point d’éloge flatteur », cette phrase du « Mariage de Figaro » est
en exergue du journal qui vous donne la parole et si, comme vous le dites : « Historiquement,
la fonction publique est restée très silencieuse sur son action à cause du
devoir de réserve », je crains pour ma part que cela soit plus à cause du
droit qu’elle s’est arrogée de ne pas communiquer.
On voit par-là que l’avenir est à la
perpétuation de la réforme.
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