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dimanche 27 décembre 2015

Chroniques de Serres et d’ailleurs. (15)

Comme le chantait Georges Brassens : « Y’a pas seulement à Paris/ Que le crime fleurit/ Nous au village aussi on a/ De beaux assassinats ».
En effet, pourquoi faudrait-il toujours que tout se passe à Paris et dans les grandes villes alors que l’on est capable de tant de choses étonnantes dans la profondeur de la ruralité. Et, comme me le disait un villageois l’autre jour : « On n’est pas plus bête que les citadins et on arrive même sans difficulté à être aussi stupides qu’eux ». Car à notre époque où l’on n’arrête pas le progrès, le véritable défi n’est plus d’être le meilleur mais plutôt d’être le moins pire - si l’on peut parler ainsi - tout en cherchant à n’être pas en reste. Les croquants ont les mêmes télévisions avec les mêmes programmes que les urbains ainsi que des politiciens et des journaleux de la même farine, les mêmes hyper ou super marchés, les mêmes fast-foods et les mêmes magasins franchisés. Ils jouissent d’une fonction publique aussi prospère qu’ailleurs. Que pourraient-ils vouloir de plus ? Toutefois, il est une chose que les Parisiens n’auront pas, enfin les franciliens ou franco-insulaires ferais-je mieux de dire, c’est la joie de donner un nouveau nom à leur région.
La réforme régionale bat son plein, des élections ont eu lieu et les nouveaux conseils élus auront pour tâche première de donner un nom à ces conglomérats quelquefois hétérogènes au goût de certains. Mais donner un nom, cela n’est pas rien même si on admet qu’on ne peut pas contenter tout le monde et son père. Et pour ce faire, il existe des consultants, des agences spécialisées et même des chercheurs, le tout en ce qui est appelé « marketing territorial ». Je ne citerai pas de définitions du marketing territorial car je ne suis nullement chargé de donner la migraine aux auditeurs. En résumé, il s’agirait d’une « boite à outils » comprenant des outils méthodologiques, des techniques et bonnes pratiques afin de permettre à un territoire de renforcer son attractivité. Il est à noter que lorsque des bureaucrates parlent de boîte à outils, il ne s’agit nullement pour eux de se mettre à un travail manuel. La boîte à outils est une boîte imaginaire avec des outils conceptuels et virtuels. La seule chose franchement matérielle dans toute cette affaire est le pognon qu’ils retireront de leurs ingénieuses élucubrations.
Donc, il existe des marketeurs territoriaux qui sont capables de proposer des noms pour nos futures régions. Bien sûr, auparavant on aura fait des référendums ou des consultations mais le propre des consultations de ce genre est de faire plaisir à ceux qui y participent afin de mieux leur faire avaler le contraire de ce qu’ils demandaient. On voit bien que bon nombre d’élus ont, en ce qui concerne les noms des communautés de communes, une imagination débridée qui aboutit à de surprenants amalgames permettant de créer de navrants acronymes. Désormais, ce seront des professionnels qui se chargeront, moyennant finances, de faire encore pire. L’argent est, parait-il, fait pour circuler. Mais pas n’importe comment et pas dans n’importe quelles poches.
Le pire est donc à craindre mais cela sera un pire estampillé, homologué et certifié. Nous aurons des noms de régions et notre seule maigre consolation sera qu’il y aura moins de régions qu’avant et donc moins de noms barbares à se coltiner que s’il y en avait eu plus.

Alors, pourquoi ne pas neutraliser provisoirement ces barbarismes nouveaux en attribuant simplement des numéros à nos régions comme on l’a fait pour nos départements ? On tirerait au sort les numéros sans devoir attribuer le numéro treize puisque l’ile de France gardera son nom.
On voit par-là qu’une île est toujours possible.

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