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jeudi 23 juin 2016

René-la-Science (3)



Je me déshabillai et me couchai. Le lit était confortable et le sommeil me vint rapidement. Vers minuit, je fus réveillé par des plaintes, ou des gémissements qui me semblèrent venir du rez-de-chaussée. N’osant pas allumer ma lampe de poche, je regardai à la fenêtre. Je vis une voiture devant la maison, sans doute une vieille Renault 5. Cette voiture n’était pas là quand nous étions arrivés avec René. Cela me parut bizarre : soit la maison avait des occupants inconnus de son propriétaire, soit René me montait un bateau dont je le sais capable… Pour en savoir un peu plus, je me rhabillai puis entrouvris la porte de la chambre. Venant d’une des chambres du rez-de-chaussée, j’entendis un râle que j’identifiai comme étant de plaisir car il était suivi d’un « oui, oui, mon chéri » qui ne laissa subsister aucun doute. Et, concluant que toute intervention de ma part risquait d’être considérée comme déplacée, je revins dans ma chambre et me déshabillai une autre fois. Je me recouchai, assez ému tout de même à l’idée du plaisir que se donnaient mes colocataires. Cette émotion fut de courte durée. J’entendis un bruit de moteur dans la cour devant la maison. Le lieu devenait décidemment très fréquenté pour une maison abandonnée. Je me relevai et m’avançai vers la fenêtre, tout en faisant attention à ne pas laisser ma silhouette se découper dans l’encadrement. Un gros 4X4 sombre s’arrêta et un homme en descendit, laissant le moteur tourner et la portière ouverte. Il tenait une lampe torche et se précipita vers la porte d’entrée de la maison. Je ne pouvais plus le voir, mais j’entendis qu’il se mettait à visiter bruyamment les pièces au rez-de-chaussée. Je commençais à me rhabiller lorsque j’entendis des éclats de voix : « Sylvie, sors de là, à la maison, salope ! », puis une sorte de cavalcade. Je me remis à la fenêtre et pus apercevoir le conducteur du 4X4 traînant vivement une femme, qui, malgré l’obscurité, me sembla complètement nue. Il la poussa à la place du passager. « Reste-là, tes vêtements vont arriver » cria le chauffeur. Il repartit vers la maison, j’entendis un bruit de dispute suivi de deux coups secs et un bruit de chute. Je l’entendis ressortir et le vis avec un paquet de vêtements qu’il jeta du côté passager en criant : « rhabille-toi, pétasse ! ». Il remonta à la place du chauffeur, embraya brutalement et fit un demi-tour qui remua tout le gravier de la cour. Ayant vu partir le 4X4, je finis de me rhabiller. Ce que j’avais vu me laissait soupçonner qu’il restait un protagoniste de cette scène dans la maison et je souhaitais tout de même avoir quelques éclaircissements sur ce qui s’était passé.
Cette fois, j’allumai ma lampe de poche et descendis l’escalier. La porte d’une des deux chambres était ouverte, une lumière allumée, et un mec complètement à poil était allongé par terre, le visage en sang. Mais il était conscient, suffisamment pour murmurer : « le con, le con, le con… ». Il me regarda sans surprise apparente, comme si ma présence allait de soi. Il me sembla qu’il n’avait pas d’hémorragie et je remontai à ma chambre pour prendre une bouteille d’eau que j’avais portée. Je revins vers mon blessé et je le tirai pour l’appuyer contre un mur.
— Je vais essayer de vous nettoyer le visage, laissez-moi faire, lui dis-je.
— Mais qui êtes-vous ?, dit-il en articulant péniblement.
— Votre ange gardien peut-être, ou un simple passant…
— Ce con m’a pété la mâchoire et éclaté le pif !
— Attendez, ne parlez pas et laissez-moi vous nettoyer un peu. Vous voulez que j’essaye de trouver un médecin ?
(à suivre...)

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