— Surtout pas, laisse
tomber, mais merci quand même.
J’avais réussi à lui
redonner une figure acceptable en l’essuyant avec un chiffon humide.
— Vous voulez vos
vêtements ? Lui demandai-je.
— Oui, je commencerais
presque à avoir froid, et puis ce n’est pas une tenue…
— Je vais vous aider à
vous relever, vous avez dû tomber brutalement par terre.
— Tu parles, Charles, ce
con m’a carrément assommé.
— Ce n’est pas prudent
non plus de cocufier un malabar, avançai-je insidieusement.
— Oh toi, tu veux tout
savoir sans rien payer…
— Attends, attends,
d’accord pour tout savoir, mais j’ai un peu payé d’avance. J’avais
l’autorisation de dormir ici cette nuit. Je m’endors et je suis réveillé par
vos soupirs quelque peu bruyants. Je vais pour me rendormir et vous me jouez la
grande scène du vaudeville. Et pour finir, je joue les infirmières…
— D’accord, je vais tout
te raconter, je finis de m’habiller, j’ai des bougies dans ma bagnole, du
pinard et du saucisson. On va bien trouver des godets, une table et des chaises
dans cette turne.
— Je vois que monsieur
est un amant, que dis-je un Roméo, organisé. Le petit souper aux chandelles,
picrate et sauciflard ! Bonjour le romantisme !
Pour le coup, je fis
rigoler le Roméo qui se releva en gémissant. Il partit chercher le
ravitaillement dans sa voiture et revint. Nous nous installâmes autour de la
table de la cuisine.
— D’abord, je me
présente, mon prénom c’est Michel.
— Appelle-moi Fortunio,
lui répondis-je.
— C’est ton nom ?
— Mais non, c’est un
petit surnom que m’a donné le copain que je suis venu voir ici. C’est lui qui
connaît le propriétaire de la maison. Et toi, tu avais son autorisation pour
faire de sa baraque un baisodrome ?
— Non, bien sûr, mais il
y avait urgence, je connais la maison et Valin, le propriétaire. Je sais qu’il
y héberge de temps en temps de la famille, l’été. Mais il n’y avait pas de voiture,
je ne pouvais pas savoir. Bon, mais inutile de lui en parler.
— Moi je veux bien me
taire, mais tu nettoies votre bordel sinon je cause…
— D’accord, tiens bois un
coup, dit Michel en remplissant au cubi deux verres Duralex qu’il avait trouvé
dans un placard.
— A ta santé, à ton nez,
à tes femmes, tes chevaux et à ceux…
— A notre santé tout
court, coupa-t-il. J’ai pas de chevaux.
(à suivre...)
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