V. René-la-Science
Sur la route, une chose
me revint en mémoire, le coup du portable qui affiche : « aucun nouveau numéro
». Je n’avais pas approfondi en présence de Fauchet, mais là je m’arrêtai et sortis
mon portable. Je consultai les appels reçus et je constatai que ce numéro
m’avait appelé la veille à huit heures douze ? Bizarre. A cette heure-là, je
dormais encore… Je regardai les numéros composés et je vis que j’avais appelé
ce numéro le même jour à huit heures dix… Là, il y avait comme un schisme,
aurait dit mon ami René. Et je craignais de commencer à comprendre. Quelqu’un s’était
servi de mon téléphone pendant mon sommeil et ce quelqu’un c’était Magali.
J’étais presque certain d’avoir laissé mes papiers et mon mobile dans le
fourgon. Fourgon qui était fermé, certes, mais j’avais laissé mes clés sur le meuble
dans la cuisine chez Michel. Ou Magali les avait prises dans ma poche. Et elle
avait appelé de mon portable. Cela ne pouvait être qu’elle. Mais pourquoi ? Si
c’est le cas, elle m’avait bien roulé dans la farine, j’en rigolai tout bas. Et
me dis que si elle m’avait manipulé, il se pouvait que Sylvie jouât aussi un
double jeu. La parano n’était pas loin et je ne voyais pas très bien les intérêts
des uns et des autres dans cette affaire. J’étais en plein polar rural, il ne
manquait plus qu’un cadavre. Il y avait bien le macchabée du souterrain, mais
l’affaire remontait à plus de trente ans ; il y avait prescription dirons-nous.
J’arrivai au bois de
Montieu en même temps que René. Il se gara dans un endroit discret et monta
dans mon fourgon.
— Salut mon Fortunio,
as-tu bien travaillé ce matin ? Ou plutôt, dis-moi si tu as bien dormi cette
nuit.
— Comme une souche, mon
cher La Science, et toi ?
— Oh, moi, tu sais, mes
nuits sont moins agitées que les tiennes… lâcha-t-il.
— D’accord, je vois que
rien ne t’échappe. On va manger au petit restau-bistrot de Clézeau ?
— Oui, c’est bien, on y
mange correctement et le service est rapide. Tu connais la route maintenant.
Mais revenons à nos moutons, ceux que tu n’as pas eu besoin de compter cette
nuit…
— Aurais-tu entendu
passer un véhicule ? Questionné-je.
— Un peu mon neveu, pas
dans le genre discret, le style 4X4. Le boxeur était-il de retour ?
— Non, c’était Madame,
elle avait oublié quelque chose l’autre soir et elle venait le récupérer.
— L’a-t-elle trouvé ?
Madame est-elle allée au fond des choses ?
— Dis-donc, René, tu
m’aurais pas un peu espionné des fois ?
— Ah non, mais j’ai
entendu un bruit de moteur et maintenant, avec tout ce qui se passe depuis que
tu es là, je me mets à la fenêtre et je regarde passer les trains…
— Bien, donc madame était
venue me mettre en garde contre son époux et pour me prouver sa bonne foi, elle
me l’a susurré au creux de l’oreille, une fois à gauche et une fois à droite…
— Madame est généreuse et
le bois du Blédard l’inspire particulièrement. Je me demande si je ne devrais pas
déménager. Mais dis-donc, toi, tu fais bonne fortune et bon cœur en ce moment.
Le bois du Blédard te profite bien, mon cochon.
(à suivre...)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire