4. L’océan Atlantique. Du
3 au 10 octobre.
Auditrices
et auditeurs de CoolDirect bonjour. Plus de doute, nous sommes dans l’océan
Atlantique. Cette étendue d’eau est infinie, que le regard se porte à tribord,
bâbord, avant ou arrière. Sans oublier la troisième dimension, la hauteur et
son pendant, la profondeur car nous voguons au-dessus d’abysses. La carte
marine affichée dans le mess indique actuellement une profondeur de quatre à
cinq mille mètres. Maintenant on sent bien que les vagues sont plus soutenues
et plus amples. Notre cabine dispose de deux hublots, presque des fenêtres et,
comme elles sont à l’avant-dernier étage du château, nous avons une bonne vue
sur l’océan, nettement au-dessus des plus hauts conteneurs. Pour avoir vraiment
le contact avec l’air marin, il y a de chaque côté, au bout de notre couloir,
un pont sur lequel nous pouvons aller. Suivant le vent, il y a un choix à faire
car le vent rabat l’odeur fade et écœurante des fumées. Il est aussi judicieux
de passer à son cou la courroie de l’appareil photographique ou des jumelles
car, quand le vent souffle en rafales, il n’est pas impensable de se les faire
arracher. Tous les 2 jours, on nous avertira d’un changement d’heure, C’est fou
les heures de sommeil qu’on gagnera !
Nous
voilà partis pour 10 jours d’océan à perte de vue, le moindre bateau à
l’horizon est presque un évènement. Avec près de cinq kilomètres d’eau sous les
pieds, c’est peut-être le moment de parler des procédures d’urgence à bord.
Trois éventualités sont prévues en ce qui nous concerne : l’alarme
générale pour laquelle la sirène émet sept signaux courts suivis d’un long,
l’alarme au feu donnée par deux signaux longs, et l’alarme en cas d’abandon du
navire signalée par un signal court suivi d’un signal long. Dans les deux
premiers cas, les passagers doivent se rendre d’urgence sur le Pont supérieur
et dans le cas d’abandon du navire à l’étage B où se trouvent les radeaux et
les canots de survie. Dans notre cabine, nous avons en outre chacun une life jacket et une combinaison
d’immersion. J’ai eu l’occasion d’entrer dans un des canots de survie, rien à
voir avec les chaloupes d’antan. Ce sont des canots fermés, en principe
insubmersibles où l’on est serré comme des sardines. Des bouées sont prévues
sur tous les ponts.
Le
guidage par satellite (GPS) de mon téléphone portable continue à fonctionner.
Cela m’avait permis d’identifier les côtes et Clarke m’indique comment afficher
les coordonnées géographiques du bateau que nous reportons sur la carte marine
épinglée dans le mess des officiers. À l’aide de ce point régulier nous pouvons
voir notre avancement dans cet océan où nous avons à parcourir quelques
6 600 kilomètres pour atteindre le port de Charleston.
Bien
que la mer soit calme, les conversations sont agitées à table entre les
passagers car un ouragan appelé Matthew
remonte des Bahamas vers la côte est des Etats-Unis. Comme les passagers
américains ont une connexion satellite, nous avons donc un grand nombre
d’information sur ce Matthew. A onze
heures, la sirène retentit pour une alarme générale. Le haut-parleur de cabine
envoie un message signalant un damage,
soit une avarie et se termine en demandant aux passagers de ne pas réagir. Nous
constatons que le navire est, sinon arrêté, tout au moins à vitesse très
réduite. Nous n’aurons aucune précision sur cet incident mais quoiqu’il en soit
le navire repart. Dans l’après-midi, nous entrons dans un brouillard assez
dense. À 17 heures 20, la corne de brume est mise en route, au rythme de six
secondes toutes les deux minutes.
Nous
sommes au-dessus de la plaine abyssale de Suhm, à une profondeur de 6 000
mètres. Le port de Charleston sera
fermé jusqu’à mardi à cause de l’ouragan, le navire va ralentir sa vitesse pour
rejoindre le port au plus tôt mardi 11. Le
planning prendra certainement du retard, car les bateaux qui n’auront
pas pu aborder dimanche et lundi aborderont mardi. De plus, voilà qu’une
tempête tropicale appelée Nicole souffle
sur les Bermudes en remontant vers notre route. Le capitaine (master) nous affiche maintenant les
informations sur l’ouragan et la tempête. Ces informations sont en anglais,
bien sûr, car, si l’armateur du bateau est une compagnie française, la seule
langue officielle à bord est l’anglais, tant pour les relations avec l’équipage
que pour tous les documents écrits.
Les
repas sont servis selon un horaire strict et un officier a demandé au steward
de nous le rappeler. Nous avons une demi-heure pour manger et, pour être bien
surs que nous n’abuserons pas, le plat chaud est servi tiède sinon presque
froid : il est certain que cela fait gagner du temps. A moins qu’on ne
repasse son assiette au four à micro-ondes, ce qui évidemment rallonge le
temps… Il est difficile de savoir ainsi par quoi commencer puisque la soupe
n’est guère plus chaude…. Et la viande a eu le temps de dessécher aussi dans
l’assiette… Que faire ? Il y a chaque jour les mêmes crudités : rondelles
de carottes, de concombre (à moins que cela ne soit de la courgette), oignon…
au bout de quelques jours, on s’en lasse… j’ai déjà trop parlé, une demi-heure
est bien vite passée !
Le
dimanche, nous passons au large des Bermudes. Nous sommes toujours dans l’océan
et au ralenti pour laisser passer Matthew.
Le capitaine a expliqué brièvement qu’un bateau, l’année dernière, a voulu
braver un ouragan. C’était un grand bateau aussi mais il a été perdu avec tout
son équipage. De quoi inciter à la prudence...
C’est
l’occasion pour parler un peu de la vie à bord. Dimanche est ici un jour comme
les autres pour des marins qui travaillent sept jours sur sept. On avait
entendu dire que les passagers mangeaient à la table du capitaine,
billevesées ! On ne le voit que rarement, ce capitaine et quand on a
l’occasion de le voir il s’est bien souvent déjà courtoisement éclipsé. On le
voit parfois finir son repas en vitesse, partir avec son dessert et
pfouittt !
Pendant
la matinée, un message par haut-parleur nous avertit d’une inspection des
cabines et en effet un groupe passe dans le couloir avec le capitaine. Notre
porte étant presque toujours ouverte, nous les voyons passer mais il ne s’agit
que d’un survol, le master nous
demande si tout va bien, oui, c’est tout. Et de plus, tel l’éternel malchanceux qui s’enrhume jusque sous les tropiques, me
voilà pourvu d’un rhume ou d’une petite crève due à la climatisation excessive.
Il me faudra bien deux jours pour m’en défaire et dix minutes pour trouver
comment bloquer les bouches d’arrivée d’air.
On
se rapproche des côtes, les oiseaux viennent nous l’apprendre, ils sont trois
ou quatre à tourner autour du bateau. Parmi eux, une sorte de petite mouette
grise et blanche, apparemment très fatiguée qui s’installe sur un conteneur
devant nos fenêtres et qui y restera plus d’une heure.
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