Auditrices et
auditeurs qui m’écoutez, bonjour. « Le mieux est l’ennemi du bien ».
Voilà encore une sentence frappée au coing du bon sens. Ce dicton a déjà fait
l’objet d’une chronique dans laquelle j’avais laissé la place à un glorieux
ainé[1] qui nous
avait entraîné dans un dédale de réflexions, revenons-y donc après avoir vu ce
que peut être le bon sens.
Le bon sens est une
variété de cognassier que nombre de gens affirment posséder dans leur jardin
mais méfions-nous des contrefaçons. Le plus redoutable bon sens est celui que
d’aucuns nomment bon sens paysan car
bien souvent il n’a rien ni de bon sens ni de paysan (comme celui qui en parle
car un vrai paysan ne parle pas de bon
sens paysan, voyons !) mais cela permet à celui qui déclare en être pourvu
de dire ou de faire quelque stupidité en la parant des habits d’une vérité
terrienne supposée. Alors que la vérité, comme l’on sait, aime à se promener
toute nue… Laissons donc ces citadins à leurs mythes.
Après ce nécessaire
préliminaire, voyons si le mieux est l’ennemi du bien. Notre exégète nous avait
expliqué que si le mieux est l’ennemi du bien, le mal, ennemi lui aussi du
bien, pourrait donc être l’ami du mieux et le mieux ainsi devenir plus mal que
bien ou réciproquement. C’est à ce moment-là qu’il nous a lâchés pour fuir le
minotaure.
Voyons ce qu’il se
passe de nos jours : on voit de partout des diplômés, des sportifs de haut
niveau, des chefs ainsi que des têtes pensantes prôner l’excellence en
tout : citius, altius, fortius [2]devisait
Coubertinus. Et pourquoi, croyez-vous ? La réponse est simple : faire
plus, c’est s’autoriser à ne pas devoir faire assez ; faire mieux, c’est
s’exonérer de bien faire et le meilleur n’est bien souvent que l’absence du
bon. Un exemple ? Voyez ces Top
chefs que l’on exhibe sur les écrans, ils sont là pour montrer au bon
peuple tout ce qu’il n’aura pas et dont il n’a par ailleurs nul besoin. Tout
cela pour faire passer l’amère potion des légumes monsantisés, des viandes
hormonisées et des boissons frelatées que les sponsors vendent au consommateur
de base dans les supermarkets de la planète.
Vous avez bien
compris, le plus est une manière d’occulter le fait qu’il suffirait d’avoir
assez, le meilleur permet de dissimuler l’absence du bon et le mieux est une
façon de s’exonérer de ne pas être capable de bien faire. Un exemple :
voyez ces bordures de champs brûlées par le désherbant là où il pourrait y
avoir des herbes sauvages, des fleurs et des petits animaux. Il ne suffit plus
de désherber un champ, encore faut-il détruire la vie qui l’entoure… on voit là
que le bon sens paysan a ses limites, même chez le paysan. Le plus, le mieux et
le meilleur sont les diverses figures du trop que les classes dirigeantes,
scientifiques ou médiatiques nous infligent au détriment du suffisant.
On voit par-là
qu’avec le culte du trop et le trop de culte l’effet se recule.
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