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jeudi 19 octobre 2017

René-la-Science (72)



Et nous voilà plongés dans l’écoute de la symphonie fantastique. Je me demandai comment j’allais m’y prendre pour lui tirer les vers du nez au sujet de son coup de fil de l’autre matin. Berlioz faisait monter la pression dans ma tête, ce n’est peut-être pas la musique qu’il m’aurait fallu. Je décidai de laisser les choses en l’état jusqu’après avoir vu Michel.
Sur un air de piano, nous arrivâmes en vue de l’aire du Frontonnais et je proposai à Magali de faire un arrêt pour boire un café. L’atmosphère était tendue et je vis que Magali, qui était si épanouie au moment de partir, se tenait voûtée et contractée sur son siège. Je garai mon fourgon et nous descendîmes. Nous entrâmes dans la station-service et je commandai au bar deux cafés pendant que Magali s’éclipsait. Ensuite, nous bûmes nos cafés, toujours en silence, et ressortîmes. Je pris doucement Magali par la taille. Elle se tourna vers moi, le regard triste.
— Fortunio, j’ai peur, me dit-elle doucement.
— Tu as peur de moi ? Dis-je.
— Non, pas de toi, pas quand je suis avec toi. J’ai peur de Fauchet. Il faut vraiment que je te parle, ce type me tient sous sa coupe et il le sait. J’ai peur de lui, j’ai peur, j’ai peur…
— Monte dans le fourgon, qu’on puisse parler tranquillement.
— Oui.
Nous étions dans le fourgon et Magali se mit à pleurer doucement. Je la laissai pleurer sans poser de question, sans intervenir.
— Tu me trouves bizarre, non ? Me dit-elle en tentant de sécher ses larmes.
— Non, je crois que je suis capable de comprendre, mais essaye de m’expliquer, répondis-je en lui tendant un mouchoir.
— Merci, dit-elle en passant le mouchoir sur ses pommettes. C’est un peu long à raconter tu sais…
— Sans doute, mais je crois que tu as besoin d’en parler et il faut prendre maintenant le temps de le faire pour que nous puissions encore nous parler en face.
— Oui, oui. Ce n’est pas facile, tu en penseras ce que tu veux, mais je ne peux plus garder tout cela pour moi.
— Alors, vas-y si tu le peux, dis-je. Je t’écouterai jusqu’au bout, sans a priori.
— Bon, je me lance, allez. Je t’ai dit comment j’en étais venue à vivre avec Michel, tu t’en souviens ?
— Oui, je t’écoute.
— J’ai connu Roger Fauchet comme patient, il était venu une fois à mon cabinet à Veyriat, pour une rééducation, au niveau du dos si je me souviens bien. Il était venu pour une dizaine de séances, un client comme un autre. Il était bien un peu dragueur, mais je l’avais assez vite remis en place et tout s’était bien passé. Puis, j’ai fermé mon cabinet, j’ai commencé à vivre avec Michel. Quelques mois passent, un an même peut-être et me voilà de bon matin par un jour de pluie à attendre le bus qui va à Villeneuve, pour aller à la gare prendre le train pour Toulouse. J’avais des démarches à faire suite à la succession de mes parents et pour me faire conduire à Toulouse par Michel, c’était toujours galère : soit il n’avait pas le temps, soit la voiture était en panne, bref le plus simple était de prendre le bus puis le train. Bon, le bus avait du retard et voilà Roger Fauchet qui passe avec son gros 4X4. Il me reconnaît et s’arrête. Il me propose de me porter à Villeneuve, puis quand je lui dis que je vais prendre le train pour Toulouse, il me répond qu’il doit justement aller chercher une pièce pour une de ses machines chez un concessionnaire aux Minimes Il me dit qu’il me déposera près d’une station de métro et qu’on se retrouve vers treize heures place du Capitole et qu’on mangera quelque part ensemble. Tout cela était parfait, j’ai le temps dans la matinée de faire ce que j’avais prévu et nous mangeons ensemble en centre-ville. Roger était vraiment charmant, il a un peu insisté pour me faire boire un peu plus que je n’aurais dû et dans l’euphorie, j’ai accepté de me laisser entraîner dans une chambre d’hôtel. Tu as compris je suppose…
(à suivre...)

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