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dimanche 5 novembre 2017

Chronique de Serres et d’ailleurs III (8)



Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. L’automne est là et, comme le dit Apollinaire, le pré est vénéneux mais joli en automne. Pour qui sait s’y reconnaître, c’est la saison des champignons, tous ne sont pas dangereux, heureusement, et tous ne sont pas dans les prés non plus.
Dans les prés, les rosés, parfois en ronds de sorcière, surmontent l’herbe de leur cloche blanche et brillante alors que lépiotes et coulemelles étalent leurs pâles sombreros dans les prairies mouillées. Plus loin, les mousserons, dits faux, se dispersent puis se rassemblent en ronds ensorcelés, solides sur leurs petites jambes de fer.
Dans les bois, on entend le soir le son de la trompette de la mort, noire comme l’enfer et délicieuse comme le jardin d’Eden lorsqu’elle est dans l’assiette, philanthropique truffe du pauvre et succulent accompagnement des pâtes fraîches comme de l’omelette. Plus loin la girolle luit doucement sur son pied solide et quelques pieds-de-mouton éclairent aussi le sous-bois. De-ci et de-là, les lactaires sanguins se groupent en troupeaux orange et ils pleurent doucement leur sang sur votre main lorsque vous les coupez. Les petits sont en boutons serrés et les grands s’épanouissent en parasols clairs. Les clitocybes et les chanterelles d’automne se planquent en troupeaux dans les fougères et les buissons, les bolets de toutes sortes vous narguent en faisant rêver au grand maître des champignons, le cèpe à la tête noire, au pied enflé et généreux, pain des petits écureuils et tabouret des crapauds.
Ils sont là, en effet, les champignons, et je vous ai révélé où on les trouve : dans les prés et dans les bois. Bien sûr, vous n’en saurez pas plus car le plaisir est autant dans la découverte que dans la dégustation, dans la cueillette que dans la cuisson.
C’est aussi la saison où tombent les noix et les châtaignes – ah ! La castagne si prisée des mémés toulousaines à entendre Nougaro -, la saison où mûrissent poires et pommes, où les coings se préparent à passer en gelée et en pâte de fruit et la saison où les feuilles mortes couvrent le sol de leur si gracieux tapis ocre et rouge. La saison des nuages qui passent et fertilisent les sous-bois, la saison encore de l’été indien et du retour du boudin noir.
Et voilà le vin nouveau qui arrive, égayant les soirées au bord de la cheminée et appelant à la rescousse maintes châtaignes grillées ou faisant passer l’âpre goût des noix fraîches.
L’automne, c’est également la saison des glands, les vrais, ceux dont on fait des chênes, ceux qui rompent mais ne plient point. Car il y a aussi les glands des quatre saisons, particulièrement nombreux en année électorale : 2017 n’a pas fait exception et fut même, semble-t-il, un cru à retenir dans les annales.
On voit par-là qu’il n’y a pas que sous les chênes qu’on trouve des glands.

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