Auditrices et auditeurs
qui m’écoutez, bonjour. L’automne est là et, comme le dit Apollinaire, le pré
est vénéneux mais joli en automne. Pour qui sait s’y reconnaître, c’est la
saison des champignons, tous ne sont pas dangereux, heureusement, et tous ne
sont pas dans les prés non plus.
Dans les prés, les rosés,
parfois en ronds de sorcière, surmontent l’herbe de leur cloche blanche et
brillante alors que lépiotes et coulemelles étalent leurs pâles sombreros dans
les prairies mouillées. Plus loin, les mousserons, dits faux, se dispersent
puis se rassemblent en ronds ensorcelés, solides sur leurs petites jambes de
fer.
Dans les bois, on entend
le soir le son de la trompette de la mort, noire comme l’enfer et délicieuse
comme le jardin d’Eden lorsqu’elle est dans l’assiette, philanthropique truffe
du pauvre et succulent accompagnement des pâtes fraîches comme de l’omelette.
Plus loin la girolle luit doucement sur son pied solide et quelques
pieds-de-mouton éclairent aussi le sous-bois. De-ci et de-là, les lactaires
sanguins se groupent en troupeaux orange et ils pleurent doucement leur sang
sur votre main lorsque vous les coupez. Les petits sont en boutons serrés et
les grands s’épanouissent en parasols clairs. Les clitocybes et les
chanterelles d’automne se planquent en troupeaux dans les fougères et les buissons,
les bolets de toutes sortes vous narguent en faisant rêver au grand maître des
champignons, le cèpe à la tête noire, au pied enflé et généreux, pain des
petits écureuils et tabouret des crapauds.
Ils sont là, en effet,
les champignons, et je vous ai révélé où on les trouve : dans les prés et
dans les bois. Bien sûr, vous n’en saurez pas plus car le plaisir est autant
dans la découverte que dans la dégustation, dans la cueillette que dans la
cuisson.
C’est aussi la saison où
tombent les noix et les châtaignes – ah ! La castagne si prisée des mémés
toulousaines à entendre Nougaro -, la saison où mûrissent poires et pommes, où
les coings se préparent à passer en gelée et en pâte de fruit et la saison où
les feuilles mortes couvrent le sol de leur si gracieux tapis ocre et rouge. La
saison des nuages qui passent et fertilisent les sous-bois, la saison encore de
l’été indien et du retour du boudin noir.
Et voilà le vin nouveau
qui arrive, égayant les soirées au bord de la cheminée et appelant à la
rescousse maintes châtaignes grillées ou faisant passer l’âpre goût des noix
fraîches.
L’automne, c’est
également la saison des glands, les vrais, ceux dont on fait des chênes, ceux
qui rompent mais ne plient point. Car il y a aussi les glands des quatre
saisons, particulièrement nombreux en année électorale : 2017 n’a pas fait
exception et fut même, semble-t-il, un cru à retenir dans les annales.
On voit par-là qu’il n’y
a pas que sous les chênes qu’on trouve des glands.
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