— Oui et j’ai fait exprès
de tirer vers l’imposte, c’est un peu risqué, la balle part dehors, mais elle
ne s’enfonce pas dans le mur.
— Eh bien, tu m’en diras
tant !
Et je conclus ainsi notre
soirée.
Le lendemain matin, je
mis Magali au courant de l’existence du coffre et de son contenu et,
évidemment, elle fut complètement abasourdie d’apprendre que ce pactole était
non seulement en lieu sûr, mais encore allait pouvoir servir à mettre la maison
de Michel en état de l’accueillir correctement et sans trop regarder à la
dépense. Je lui expliquai que j’étais titulaire de ce coffre, mais que René
avait une procuration. J’ajoutai que nous ferions assez rapidement un
transfert, probablement à son nom à elle. Mais il faudrait d’abord savoir si
Michel serait mis sous tutelle et qui serait tuteur.
Nous regardâmes ensuite
les travaux et je donnai à Magali des adresses d’entreprises qui m’avaient
parues correctes. Et avant midi, je repartis vers le Lot-et-Garonne.
VIII. Sylvie
Je repris mon activité de
maçon sur le marmandais, de temps à autre Magali me téléphonait pour me
demander des conseils, donner des nouvelles de l’avancement des travaux, parler
de l’évolution de la réadaptation de Michel. Comme il était difficile de régler
le problème de la tutelle, elle envisageait de se marier avec lui. Elle était
en même temps dans le désir d’action et de bien faire et pour autant, je
sentais bien qu’il y avait de la résignation aussi dans sa manière d’aborder
les choses.
J’eus aussi de temps à
autre un coup de fil de René, il était souvent présent chez Michel, s’occupant
des problèmes financiers et des relations avec les entreprises.
Un jeudi soir, j’eus un
appel de Sylvie. Elle devait, dit-elle, aller passer un jour ou deux à Bordeaux
et me demandait de l’héberger pour la nuit du vendredi au samedi. Mon sang ne
fit qu’un tour et j’acceptai illico. Elle arriva donc le lendemain soir,
j’avais mis les petits plats dans les grands et j’avais passé une bonne partie
du vendredi à mettre de l’ordre dans ma vieille bicoque. J’étais aux anges de
l’accueillir et elle était à l’unisson. Le repas prit un peu de retard car nous
avions plus pressant à faire. Et la nuit fut évidemment torride. Cette petite
futée devait effectivement aller à Bordeaux mais n’en avait pas pour deux jours
et je compris qu’elle n’irait là-bas que le dimanche. Nous avions donc tout le
samedi plus la nuit pour nous deux. Elle était aussi venue pour me donner des
nouvelles de nos quatre bras cassés. Marco Carbiat était reparti le soir
même sur Rodez, jurant ses grands dieux qu’il ne remettrait plus les pieds dans
le Sciéraquois. Fauchet père, le Siméon, n’avait pas réussi à cacher la déroute
de ses sphincters à Ninon, sa femme. Il y avait eu du grabuge sous le toit des
parents Fauchet et le Siméon s’était enfermé dans le mutisme. Fauchet Fils, Roger,
qui avait toujours été colérique et brutal, rasait maintenant les murs. Le soir
de notre rencontre il n’était pas revenu chez lui, mais chez la maitresse qu’il
avait depuis longtemps et chez qui il passait bon nombre de ses nuits. Mais,
même lorsqu’il était absent la nuit, il avait toujours été présent pour le
petit déjeuner avec sa femme et ses filles. Mais cette fois-là, il ne revint
que le surlendemain, l’air abattu. Quant à Vitteaux, il continuait à porter
beau dans Villeneuve, mais son entreprise connaissait de grosses difficultés et
il avait licencié une partie de son personnel. A plus de soixante-dix ans, il
n’avait pas voulu lâcher les rênes de son entreprise et aujourd’hui il semblait
en délicatesse pour vendre l’affaire. D’après ce qu’a compris Sylvie, c’est
Marco Carbiat qui avait relancé tout ce binz. Il venait de prendre sa retraite et
il n’avait jamais oublié cette histoire. C’était lui qui avait eu l’idée du
panneau au cimetière. Il était allé trouver le Pepito, mais celui-ci, après
cette histoire de panneau dans laquelle il avait marché, ne voulait plus
entendre parler de tout cela, il avait eu honte de cette connerie et avait
envoyé bouler Carbiat. Alors, ce dernier était allé trouver le Siméon mais
c’est surtout Roger qui a embrayé sur cette affaire et qui a mis Vitteaux dans
le coup. Mais Vitteaux, lui, était plutôt du genre à laisser les autres se
bruler les doigts en tirant les marrons du feu. Il était plutôt là en embuscade
pour récupérer l’oseille. Donc Marco et Roger sont allés en éclaireurs dans le
souterrain, après que j’eusse terminé mon chantier, puisque Roger avait la clé
du château et la clé de la cave. Ils n’ont trouvé que des armes, complètement
mangées par la rouille, et un squelette. Ils étaient furieux car il leur
semblait évident que le magot avait été enlevé peu de temps avant leur passage donc
par quelqu’un qui avait accès au château, donc par Fortunio, toujours lui,
l’autre rigolo du 47. Et ce magot, il ne pouvait pas l’avoir planqué loin. Ils
ont donc essayé de le surveiller, de surveiller la maison de Michel et le bois
de Montieu, Marco est même allé surveiller la maison de ce Fortunio-Forelle à
Marmande et il a même été fouiller dans sa maison. Mais sans rien trouver. Il
fallait donc aller un peu secouer les pieds nickelés qui leur avait soufflé le
magot sous le nez. D’où la rencontre au sommet chez Michel.
(à suivre...)
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