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dimanche 23 septembre 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs IV (2)


Auditrices et auditeurs : que vous m’écoutiez ou non, bonjour. La saison d’été excite les marchands de pittoresque et de traditionnel estampillés par les syndicats d’initiatives et autres bons offices de tourisme. Un certain nombre d’entre eux serait prêts à baisser leur pantalon et à montrer leur cul si cela devait attirer le touriste qui est considéré comme une manne financière par les têtes pensantes, pansues et dépensantes des comités départementaux chargés de capter l’estivant par tous les moyens possibles. Et dans cette rage de fabriquer du touristique, il y a une attraction incontournable, le marché gourmand. Qu’importe que ces marchés dits gourmands détournent vers eux la clientèle des étrangers en villégiature et des autochtones disponibles, qu’importe qu’en conséquence un certain nombre de petits restaurants voient fondre leur clientèle en été et dépérissent subséquemment, qu’importe que les villages se désertifient l’hiver par manque d’initiatives autres que touristiques, maintenant le moindre village se doit d’organiser de ces ripailles sur tréteaux annoncées à grand renfort de panneaux fleurissant aux carrefours et d’affichettes collées çà et là.

Mais le tourisme est international comme la peste est contagieuse et les organisateurs de ces agapes tarifées s’en voudraient de manquer quelque poisson dans le vivier des estivants de passage dans leur région. Sans compter les allochtones qui y sont installés car notre région se peuple de manière croissante d’individus exotiques et insulaires venus des iles britanniques. Mais, c’est bien connu, les ânes se frottant aux ânes – asinus asinum fricat disaient les romains dans leur langue vernaculaire – bien des anglo-saxons préfèrent vivre en circuit fermé  et pratiquent peu notre langue française. C’est pour cette raison que cet été on pouvait voir sur une affiche informant de la tenue d’un marché gourmand dans un village lotois une annonce bilingue : « Marché gourmand –Gourmet market » et plus bas : « Possibility to consume on site ». Il ne me revient pas de juger de cet anglais commercial mais je constatai que les organisateurs étaient prêts à toutes les gâteries pour s’attirer les grâces de gens qui s’intéressent apparemment plus à la boustifaille qu’à la pratique de la langue du pays dans lequel ils se trouvent. Et, je constatai en outre avec intérêt que le verbe anglais to consume peut se traduire au moins de deux manières différentes en français par les verbes consommer ou consumer. Evidemment, la possibilité de consumer sur place fut déjà prévue par les anglais à Rouen du temps de Jeanne d’Arc. Sans commentaire…

Il est étonnant de voir ainsi fleurir la langue anglaise sur nos murs et le philosophe Michel Serres s’en inquiète en signalant qu’il y a plus de mots d’anglais de nos jours sur les murs de Paris qu’il n’y avait de mots d’allemand du temps de l’occupation et il ne se gêne pas pour traiter de collabos ceux de nos compatriotes qui utilisent à tort et à travers des termes anglais. De plus, il constate que cela vient du plus haut niveau de l’Etat, ce qui l’attriste particulièrement. Mais ce n’est pas parce que les puissants jouent les collabos que l’électeur de base doit les imiter. De la résistance, que diantre !

On voit par-là que ce sont les glands qui nourrissent les cauchon.


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