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dimanche 30 septembre 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs IV (3)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Une fois encore, l’automne arrive, subreptice quoiqu’implacable. Les feuilles dorées volètent et se posent sur les trottoirs ou dans les allées, couvrant le sol d’une parure mordorée comme si elles n’avaient tant vécu que pour ce fulgurant éclat. Mais bientôt les ouvriers communaux et les retraités sourcilleux chasseront à coups de balais ces malicieuses décorations qui pourraient bien, aidées par quelque subtile pluie, menacer le col du fémur de quelque senior en goguette. Et l’on peut encore se réjouir du chant du balai alors que, le progrès faisant rage, d’aucuns chassent les feuilles avec de mélodieux souffleurs à moteur thermique. Inutile d’insister, il y a encore pire car l’élu conscient de ses responsabilités et gonflé de son importance veille au grain : il surveille de près ces arbres de tous les dangers, depuis le platane sournois qui attire l’automobiliste innocent vers son tronc jusqu’à l’envahissant marronnier qui prétend garnir les squares, les allées et les avenues de ses marrons, de leurs bogues et de ses larges feuilles. Si l’élu chevronné fait l’orgueil de la nation, il fait aussi la crainte de tout ce qui pousse naturellement et qui n’est point rigoureusement encadrable, goudronnable et cimentable. Et ce ne sont pas les nouveaux enmarchistes lobbyisés qui modifieront ce strict programme, ils sont les nouveaux zélateurs du monsantisme sous toutes ses formes religieuses, brûlant ce qu’ils ont adoré et adorant ce qu’ils ont brûlé.
Mais revenons à l’automne, ses feuilles légères, ses escargots tranquilles et ses matins brumeux. Voilà déjà que se pressent les pratelles - dites rosés des prés -, gentils boutons blancs qui avoisinent dans l’herbe le timide colchique. Voilà que les cèpes dodus s’impatientent dans les fourrés et que girolles et chanterelles tentent de soulever les feuilles pour éclairer le sous-bois de leur or brillant ; les noyers garnissent les bords de route de leurs fruits délicieux et les hirondelles se rassemblent, piaillant sur les fils aériens. A l’aube, la brume se forme sur la rivière, elle s’épaissit et emplit la vallée puis tente de gravir le coteau jusqu’à ce que le soleil paraisse et la dissipe joyeusement, rappelant que l’hiver n’est pas encore là et que l’été indien peut encore arriver.
Revenons à l’automne, les grains et les pailles sont récoltés, seuls restent quelques sorghos et maïs qui eux aussi passeront à la batteuse.  Le gros des vendanges est dans les cuviers et seules restent les rares et précieuses vendanges tardives qui attendent le vigneron en saoulant les grives. Le fin chasselas doré réjouit déjà nos palais  et les plus belles grappes attendront Noël dans leur petit panier afin de régaler les gourmets. Les sangliers dégustent les glands dans la forêt et les cerfs brament dans la nuit jusqu’à l’épuisement.
Revenons à l’automne, avec ces feuilles en arrivent d’autres les feuilles d’impôt : taxe d’habitation, taxe audiovisuelle et taxe foncière reviennent comme les marronniers. Toutefois les percepteurs ne sont pas des oiseaux migrateurs, loin s’en faut, ce sont de voraces papivores s’engraissant toute l’année des fruits de notre labeur et ils viennent jusque dans nos montagnes imposer le fisc dans les campagnes. Tout leur est zéphyr, ils ne connaissent point de saison et, comme l’âne chargé de sel, il font disparaître leur cargaison dans les ruisseaux de Bercy.
Ô saisons, ô châteaux, on voit par-là que l’on ne sait quel âne est sans défaut

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