Pijm revient chez Madame Latinian et monte dans la chambre.
Il essaye de lire un peu mais il n’a pas la tête à cela. Il se repasse le film
de la nuit, il sait qu’il n’a pas rêvé. Mais s’il n’a pas rêvé, alors que s’est-il
passé ?
Il décide qu’il est inutile de se poser cette question
maintenant. C’est La Furetière qui l’intéresse et il ira demain, seul ou avec Lisa
et les filles. Il veut encore revoir les lieux, il les a visités si rapidement
et il reste la cave et les dépendances. Et il veut en savoir plus sur les
terres qui entourent cette demeure. Il décide d’aller voir Tomi Weyenberg.
C’est Tomi qui lui a fait connaître la région. Ils se
connaissaient un peu, Tomi était dans le commerce lui aussi. Puis Tomi a vendu
son commerce et a quitté la Belgique pour acheter une exploitation agricole à
Bourgnazan. Il est devenu paysan, avec des vaches, des poules, des cochons et
des tracteurs. Et, comme ils étaient restés en contact, Pijm est venu passer
des vacances dans ce village. Ils ne se voient pas beaucoup, Lisa et les filles
n’apprécient guère le coté bouseux de Tomi et de sa famille. Mais Pijm va le
voir de temps à autre. Pour Pijm, Tomi a un gros défaut, c’est d’être belge.
Mais il parle le néerlandais et c’est appréciable.
Il va voir madame Latinian et lui emprunte un vélo. Il
n’aime pas faire du vélo mais il aime encore moins marcher longtemps à pied et
la ferme de Tomi est à trois ou quatre kilomètres de Bourgnazan.
Quand il arrive chez Tomi, celui-ci est fort occupé mais il
peut tout de même lui prêter une oreille attentive en travaillant. Pijm lui
explique qu’il a visité La Furetière et qu’il a rendez-vous pour une visite
plus complète le lendemain. Tomi s’exclame :
-
La Furetière ! Mais mon vieux Pijm, c’est
un sacré morceau ! Je ne connais pas le prix demandé mais il y a le
château et ses dépendances, la maison de gardien et au moins soixante à
septante hectares de terrain. Il y a des prairies mais aussi pas mal de bonnes
terres, tu ne vas pas payer ça avec des cacahuètes, fieu !
-
Je sais, je sais, mais simplement je visite,
intervient Pijm.
-
Note que si tu sais acheter tout ça, je suis
prêt à te louer les terres, même ça m’intéresserait bien sais-tu !
-
Nous n’en sommes pas encore là, coupe Pijm, je
voulais seulement savoir si tu connais un peu La Furetière et si tu connais les
propriétaires…
-
Non, non, je ne les connais pas, personne n’y
habite plus, le dernier propriétaire est mort dans des circonstances un peu
bizarres, je ne sais pas trop, il faudrait voir mon voisin, on l’appelle
Galipette, il est toujours à droite et à gauche et il est au courant de tout.
Lui, il doit en savoir des choses…
-
Et tu dis : des circonstances un peu
bizarres ?
-
Je ne sais pas trop, il faudrait voir Galipette,
je te dis, il serait mort empoisonné, mais je te dis, je ne sais pas
trop…Reviens demain à la même heure, j’essayerai de faire venir Galipette…
-
Mais comment je vais lui parler à ton Galipette,
je ne veux pas qu’il raconte partout que je vais acheter La Furetière…, coupe
Pijm.
-
Il faut savoir ce que tu veux : soit tu
veux des infos et tu causes avec lui, soit tu vas à la pêche ailleurs. C’est
tout ce que je sais faire pour toi, je vais pas jouer les intermédiaires pour tes beaux yeux, fieu ! T’as qu’à
lui dire que tu t’intéresses à La Furetière pour le compte d’un autre, tu peux
toujours lui demander la discrétion, ça marchera ou pas. Allez, moi j’ai du
boulot. Alors, demain soir vers cinq heures et demie ou non ?
-
Prima, je viendrai et on fera comme on a dit,
conclut Pijm.
*
Au retour, la route peu accidentée qui court sur le plateau
lui laisse le temps de la réflexion. Il ne pouvait pas se confier à Tomi, ils
ne se connaissent pas suffisamment. Il ne peut pas plus parler à Lisa, elle ne
comprendrait pas. Il faut qu’il garde tout cela pour lui. Mais il ne pourra oublier
ni la vision dans La Furetière, ni celle qu’il a eue depuis l’extérieur et
encore moins la rencontre avec le petit bonhomme Tin Quiète. Il a rendez-vous
demain avec Christian. Il ira seul de préférence. Si Lisa et les filles veulent
l’accompagner, pourquoi pas, toutefois ? Mais il faut qu’il soit chez Tomi
en fin d’après-midi.
A Bourgnazan, il retrouve Lisa et les filles. Il dormait si
bien le matin qu’elles n’ont pas voulu le réveiller, et puis… il était rentré
si tard ! Pijm raconte qu’il a été retardé et qu’il s’était assez mal
garé, sur un bas-côté boueux dont il a eu du mal à sortir. Il sent bien que son
explication est un peu vaseuse mais toute la famille se met en route vers le
restaurant pour le repas du soir et les filles racontent leur journée passée au
soleil de Luxignac.
*
(à suivre...)
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